La stratégie de l’Ontario en matière de réseau propre publiée cette semaine semble tout prévoir.
La province redouble d’efforts dans le domaine de l’énergie nucléaire, maintient l’exploitation du gaz naturel et envisage d’augmenter la production d’hydroélectricité, tout en intégrant davantage d’énergie solaire et éolienne dans le réseau.
Le plan du gouvernement provincial visant à répondre aux besoins croissants en électricité à long terme mérite des éloges. Le projet d’investir davantage dans le nucléaire renforcera la certitude que le réseau électrique de l’Ontario permettra d’atteindre l’objectif zéro émission nette d’ici 2050 . Toutefois, sa dépendance vis-à-vis du gaz naturel à court terme pourrait menacer les cibles climatiques à court terme.
Le « Plan de l’Ontario pour un avenir énergétique propre » indique que le gouvernement reconnaît la dépendance de la croissance économique de la province à l’égard de plus d’électricité propre : un réseau plus vert permettrait à la province d’attirer des milliards de dollars d’investissements dans la transition énergétique, notamment dans les chaînes logistiques des véhicules électriques, la décarbonisation des secteurs industriels, le stockage de l’énergie et les minéraux critiques.
Cependant, le plan est un peu incomplet en raison de la priorité sur les années 2040. Si la province décide de maintenir les centrales au gaz naturel dans son bouquet énergétique, elle risque de susciter un conflit politique avec le gouvernement fédéral, qui s’apprête à mettre en place le règlement sur l’électricité propre.
Augmentation de la demande
D’ici 2050, la capacité de production d’électricité de l’Ontario (la quantité d’énergie que la province peut produire en même temps) devrait plus que doubler pour atteindre 88 000 mégawatts. La province aura aussi à remplacer une capacité de production d’électricité de 20 000 mégawatts dans les trois prochaines décennies. Compte tenu de l’augmentation de la population ces prochaines décennies, l’Ontario devra relever le défi d’alimenter le réseau sans accroître ses émissions.
Grâce en partie aux subventions, la province attire également des investissements sans précédent dans la fabrication de batteries pour véhicules électriques, l’élaboration d’acier propre et d’autres secteurs, ce qui pèserait sur la capacité de production. Une fois lancés, les cinq principaux investissements dans la nouvelle économie de l’énergie feront à eux seuls grimper la demande industrielle de 21 %.
Renaissance nucléaire
L’Ontario investit fortement dans de nouveaux réacteurs nucléaires pour répondre à la demande. Elle a annoncé la semaine dernière son intention de faire de la centrale nucléaire de Bruce le plus grand site nucléaire du monde, en agrandissant sa capacité de 4 800 mégawatts et en ajoutant trois petits réacteurs modulaires innovants à celui prévu sur le site nucléaire à Darlington en 2021.
Source de secours
C’est ce que la province appelle sa « police d’assurance ». Le gaz naturel continuera à jouer un rôle à mesure que les sites à Darlington et Bruce seront remis en état dans les dix prochaines années (à l’apogée, quatre unités nucléaires représentant 9 % de la capacité de l’Ontario seront hors service). À cette fin, la province est à la recherche de 1 500 MW de nouvelles capacités de production de gaz (une croissance d’environ 15 %, si réalisée). Or, cette évolution pourrait nuire aux plans de réduction des émissions de la province : selon une récente estimation de la Société indépendante d’exploitation du réseau d’électricité (SIERE), les émissions du secteur de l’électricité devraient presque tripler d’ici 2030, car les centrales au gaz remplaceront à court terme la production d’électricité nucléaire.
Certes, une certaine quantité de gaz sera requise pour répondre à la hausse des pointes de consommation due à la multiplication des journées chaudes, mais il existe d’autres options à explorer, comme nous l’avons indiqué dans notre récent rapport intitulé Virage énergétique : comment l’Ontario peut réduire sa facture d’électricité de 450 milliards de dollars.
Soutien aux énergies renouvelables
La province achète des infrastructures de stockage de l’électricité, ce qui est essentiel si elle veut utiliser l’énergie éolienne et solaire de manière plus rentable. L’acquisition actuelle de 2 500 MW d’infrastructure de stockage d’énergie propre constitue le plus important achat de batteries dans l’histoire du Canada. L’infrastructure de stockage d’énergie d’Oneida et le projet hydroélectrique à réserve pompée de Marmora représentent aussi des développements positifs.
Cependant, étant donné l’intégration de plus d’énergies renouvelables dans le réseau de la province, la construction de lignes de transport deviendra indispensable pour brancher l’électricité des sites éloignés. La province n’a pas encore défini de stratégie pour résoudre ce problème imminent de transport.
Ce qui manque
À notre avis, le plan à long terme de la province est plutôt bien conçu : le nucléaire et l’hydroélectricité renforcent la plupart des nouvelles énergies renouvelables, tandis que certaines questions se posent quant à l’électricité de pointe provenant du gaz avec captage du carbone ou de l’hydrogène. L’Ontario s’efforce d’accroître sa capacité hydroélectrique et d’explorer les technologies prometteuses à faible émission de carbone, comme le gaz naturel renouvelable et le diesel renouvelable, afin de conserver son rôle de centre des technologies propres.
Toutefois, le manque d’orientation à court terme sur les infrastructures clés suscite l’inquiétude. Le transport sera essentiel pour intégrer les énergies renouvelables, il faudra investir dans les sociétés de distribution locales pour faciliter l’électrification des ménages et s’assurer que le réseau peut alimenter les véhicules électriques et les thermopompes, et une technologie plus intelligente peut contribuer à limiter les pointes d’utilisation de gaz naturel à court et à moyen terme.
Le plan propose de bonnes premières mesures pour favoriser un système électrique plus flexible, notamment en autorisant les consommateurs à accéder aux données sur les services publics par le bouton vert (un programme de suivi de l’efficacité énergétique) et en encourageant l’utilisation de l’énergie décentralisée (comme le système héliotechnique sur le toit) ou les économies d’énergie.
L’investissement à long terme de l’Ontario dans le nucléaire permettra d’ouvrir une voie claire vers les objectifs climatiques de 2050 . Néanmoins, pour éviter d’investir massivement dans des infrastructures émettrices au cours des prochaines années, la province devra agir rapidement et rendre les coûts plus transparents pour les consommateurs.
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