Les efforts pour améliorer la mixité en sont-ils au point mort ? Les femmes atteignent les échelons supérieurs des entreprises canadiennes en plus grand nombre que jamais auparavant. Or, selon Catalyst, un organisme qui étudie l’inclusion en milieu de travail, les hommes ont encore de deux à trois fois plus de chances d’occuper un poste de haute direction. Pourquoi ?
Nous avons cherché des réponses à la Catalyst Canada Honours Conference, qui accueillait notamment quatre défenseurs de l’avancement des femmes dans leur entreprise respective. Il s’agit de Frank Vettese, associé directeur général et chef de la direction, Deloitte Canada ; de Carol Osler, vice-présidente, Crime Financiers et Groupe de gestion de la fraude, Groupe TD ; de Philip Grosch, partenaire à PwC Canada ; et d’Anna Tudela, vice-présidente, Diversité et Affaires réglementaires, Goldcorp. Ces cadres dirigeants ont affirmé que les entreprises canadiennes dans un large éventail de secteurs prennent la question de la représentation égalitaire hommes-femmes très au sérieux. Mais il reste beaucoup à faire.
Voici quelques pistes de solutions :
1. Le préjugé inconscient est une réalité
Même si des politiques sont en place pour promouvoir la représentation des femmes, celles-ci sont encore en minorité, surtout au sommet de la hiérarchie. La raison : Le préjugé inconscient existe toujours. Chez Deloitte, M. Vettese a piloté le Réseau d’initiative des femmes au Canada, ou CanWin, pour amener les femmes à se voir comme des associées potentielles et les aider à y arriver. Constatant que les chiffres changeaient peu, M. Vettese a examiné ses propres préjugés. « Je me suis rendu compte que je recrutais des gens qui me ressemblaient beaucoup », a-t-il dit.
Dans son domaine qu’est la sécurité, Carol Osler a noté que les préjugés prenaient une forme plus classique. Les hommes recherchent pour les postes de direction des candidats qui sont grands ou costaux ou, comme elle dit, qui sont capables de maîtriser un adversaire. Sa solution : retirer l’aspect physique de l’équation et rechercher des attributs également applicables aux hommes et aux femmes, comme le sens de l’observation.
M. Vettese a soulevé un autre point important. Certaines personnes sont opposées à la promotion de la diversité : elles considèrent que l’exercice est futile ou détourne de la raison d’être de l’entreprise. Comment Deloitte a-t-elle pu changer cette attitude ? En intégrant la diversité à sa proposition de valeur aux clients, en faisant valoir que des associés aux horizons variés peuvent engendrer de meilleures idées et de meilleurs résultats.
2. L’ascension professionnelle ne se fait pas toujours en ligne droite
Carol Osler mentionne qu’elle a réussi dans le secteur de la sécurité en tirant parti de toutes les occasions d’apprendre et en mettant l’accent sur ses aptitudes. Elle attribue aussi sa réussite à un autre choix : ne pas avoir baissé les bras quand elle s’est heurtée au plafond de verre de son employeur. Après s’être vu refuser une promotion qu’elle jugeait avoir méritée, Mme Osler a choisi d’accepter ailleurs un poste moins bien rémunéré. Enfin, elle est revenue à la même firme pour y occuper un poste de direction.
Anna Tudela a contourné les obstacles apparents en acceptant un poste dans une compagnie d’exploration minière en raison de l’expérience qu’elle pourrait y acquérir. Elle a exhorté les femmes dans son domaine à ne pas avoir peur de prendre des risques, comme faire un passage dans un site minier éloigné. Et si elles n’obtiennent pas la promotion convoitée, elles ne doivent pas attendre pour passer à autre chose. « Parfois, si vous êtes une femme, vous devez déménager pour découvrir où vous voulez aller », a-t-elle ajouté. C’est ce qui l’a amenée à quitter l’Amérique du Sud pour les États-Unis, puis à accepter un poste de cadre dans l’une des grandes sociétés minières canadiennes.
3. Un quota, non. Des paramètres, oui.
Certains pays européens, excédés par la lenteur de la progression vers la parité hommes-femmes au travail, ont imposé des quotas de femmes à la haute direction et au conseil d’administration. La Norvège est du nombre, de même que l’Allemagne. Jusqu’à présent, les résultats sont peu concluants. Et les quatre conférenciers ne voient pas l’intérêt d’importer cette expérience. Les quotas sous-entendent « un manque de mérite », de l’avis de Carol Osler.
Mais en l’absence de cibles précises, comment faire avancer les choses ? Selon M. Grosch, il faut examiner de près les pratiques en place — y compris le processus de recrutement — et établir des paramètres pour mesurer le progrès accompli. Et M. Vettese est d’avis qu’il faut stimuler l’engagement et niveler les structures de gestion.
4. Donner le ton de haut en bas. Passer à l’action de bas en haut.
Nos conférenciers sont d’accord pour dire que les promotions chez les femmes n’augmenteront en nombre que si la direction y adhère pleinement. Lorsque les dirigeants prennent la mixité au sérieux, leurs employés leur emboîtent le pas. Mais les choses progressent-elles assez vite ? Peut-être que non, surtout pour la génération Y. Les membres de cette génération marquent leur impatience face à la lenteur du changement en quittant les lieux, fait remarquer M. Grosch. Hommes ou femmes, les professionnels de moins de 35 ans voient l’établissement à leur compte, ou l’entrée au service d’une jeune entreprise, comme une bonne solution de rechange à la frustration ressentie en entreprise. Pour les employeurs de grande envergure, il ne s’agit pas simplement d’une perte d’employés, mais d’une perte de diversité. Les conférenciers ont conseillé aux entreprises de préciser leurs attentes envers leur personnel, puis de donner à chacun, peu importe son échelon, la chance de faire bouger les choses.
John Stackhouse est un auteur à succès et l’un des grands spécialistes en matière d’innovation et de perturbations économiques au Canada. À titre de premier vice-président, Bureau du chef de la direction, il dirige la recherche et exerce un leadership avisé concernant les changements économiques, technologiques et sociaux. Auparavant, il a été rédacteur en chef du Globe and Mail et éditeur du cahier « Report on Business. » Il est agrégé supérieur de l’institut C.D. Howe et de la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l’Université de Toronto, en plus de siéger aux conseils d’administration de l’Université Queen’s, de la Fondation Aga Khan Canada et de la Literary Review of Canada. Dans son dernier livre, « Planet Canada: How Our Expats Are Shaping the Future », il aborde la ressource inexploitée que représentent les millions de Canadiens qui ne vivent pas ici, mais qui exercent leur influence depuis l’étranger.
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