Les faits :

  • La pandémie a entraîné une baisse considérable du nombre de départs à la retraite et de démissions pour cause d’insatisfaction.
  • À mesure que le marché du travail se redresse, le nombre de personnes qui quittent leur emploi revient aux niveaux d’avant la pandémie.
  • Nous nous attendons à ce que les départs à la retraite retardés par la pandémie augmentent également au cours du deuxième semestre de 2021 et se rapprochent de la tendance sur plus de 10 ans liée au vieillissement de la génération des baby-boomers.
  • Ces phénomènes aggraveront vraisemblablement la pénurie de main-d’œuvre cet été et cet automne, notamment dans le segment des travailleurs spécialisés.
  • Le Canada devra de plus en plus compter sur l’immigration et d’autres sources pour assurer la croissance de la population active.

Le contexte :

L’incertitude planant sur le marché du travail pendant la pandémie a donné lieu à une diminution importante du nombre de démissions volontaires. Les départs à la retraite ont reculé de 20 % par rapport à la période précédant la pandémie (de mars 2019 à février 2020), tandis que le nombre de personnes ayant quitté leur emploi a chuté de 40 %. À mesure que le marché du travail se redresse, ces données commencent à tendre vers les niveaux d’avant la crise.

Cette reprise de l’emploi au Canada devrait s’accélérer au cours de l’été, sur fond d’augmentation des taux de vaccination et de réouverture de l’économie. Bien que de nombreuses personnes soient encore au chômage (en date de juin, on dénombrait environ 340 000 emplois de moins qu’avant la crise), plus de 80 % des postes non retrouvés étaient dans les secteurs de la restauration et de l’hébergement. Les autres secteurs durement touchés, comme le commerce de détail, ont pratiquement renoué avec leurs niveaux d’emploi prépandémiques. En outre, les secteurs où les employés pouvaient en grande partie télétravailler, notamment celui des services professionnels, scientifiques et techniques, ont déjà surpassé leurs niveaux d’emploi antérieur à la crise.


Les départs à la retraite et les démissions pour cause d’insatisfaction ont beaucoup diminué durant la pandémie

Moyenne mensuelle (en milliers)

Sources : Statistique Canada, Services économiques RBC


 

Les chiffres :

  • 16 700 : nombre de personnes ayant quitté leur emploi pour cause d’insatisfaction en juin (près de trois fois plus qu’en juin 2020) ;
  • 125 000 : nombre prévu de départs à la retraite au deuxième semestre de 2021, conformément aux tendances à long terme ;
  • 550 000 : nombre de postes vacants au premier trimestre, soit l’équivalent du niveau d’avant la pandémie ;
  • 4,6 % : pourcentage de postes vacants dans le secteur des services professionnels, scientifiques et techniques (contre 3,6 % pour l’ensemble des secteurs) ;
  • 65,2 % : taux d’activité actuel au Canada (oscillant autour du creux du milieu des années 1990, à l’exception des niveaux du printemps dernier attribuables à la pandémie).

Notre analyse :

Les employés sont de nouveau prêts à démissionner s’ils ne sont pas satisfaits de leur position actuelle, soit l’un des signes les plus manifestes du renforcement de la confiance à l’égard de la reprise du marché du travail. En effet, le nombre de personnes ayant récemment quitté leur emploi pour cause d’insatisfaction s’est considérablement accentué en juin. Les départs à la retraite ont déjà commencé à se multiplier, et nous prévoyons que les tendances à long terme se maintiendront au cours du deuxième semestre de l’année, en raison du vieillissement des très nombreux baby-boomers.

La hausse du nombre de départs à la retraite entraînera un déclin du taux d’activité déjà décroissant au Canada. Celui-ci a rebondi comparativement au creux pandémique, mais il se situe toujours à son plus bas niveau depuis le milieu des années 1990. Cette situation, combinée à une augmentation de la demande dans les secteurs où les postes vacants ont atteint leur niveau d’avant la crise, nous porte à croire que la recrudescence des démissions volontaires aggravera la pénurie de main-d’œuvre après la pandémie.



Des pressions considérables se font ressentir dans les secteurs où l’on observe un retour aux niveaux d’emploi antérieurs. Le pourcentage de postes vacants dans le secteur des services professionnels, scientifiques et techniques, par exemple, a déjà atteint des sommets. Qui plus est, l’Enquête sur les perspectives des entreprises de la Banque du Canada révèle que, même si nous sommes encore dans une période de sous-emploi, la disponibilité des travailleurs qualifiés s’amoindrit.

Les perspectives :

L’augmentation du taux de roulement des travailleurs pourrait sous-entendre d’autres facteurs émergents, dont le refus de retourner au bureau (57 % des entreprises qui ont actuellement recours au télétravail envisagent de revenir en présentiel). Dans un contexte de hausse de la demande de main-d’œuvre, les travailleurs peuvent profiter d’un meilleur levier de négociation pour obtenir des salaires supérieurs ou des conditions de travail plus souples. Au fil de la reprise du marché du travail et de l’intensification de la concurrence relative aux nouveaux travailleurs, il sera important de suivre l’évolution des salaires.

L’aggravation de la pénurie risque d’accroître l’urgence pour le Canada de se tourner vers de nouvelles sources sous-utilisées de travailleurs, notamment parmi les immigrants, les femmes et les minorités visibles. Cela ne permettra toutefois que d’apporter un léger soulagement à court terme. Bien que le gouvernement ait relevé le quota de nouveaux résidents permanents aux niveaux d’avant la pandémie, cette décision reflète surtout un changement de statut (de résidents temporaires à permanents). Elle n’a aucune incidence sur la taille de la population dans son ensemble. Cependant, comme la frontière est maintenant ouverte à un plus grand nombre d’immigrants, nous pouvons nous attendre à ce que le flux de nouveaux arrivants réduise la pression sur le marché du travail. Pour que les femmes et les minorités visibles puissent participer à leur plein potentiel, il faudra de nouvelles stratégies et plus de temps.

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