• La capacité du Canada à augmenter ses exportations de produits alimentaires pour contenir la crise alimentaire mondiale est limitée.
  • À court terme, la hausse de la production des cultures affectées par la guerre en Ukraine est peu probable en raison des contraintes liées à la quantité de terres pouvant être converties en terres agricoles.
  • Toutefois, en tant que superpuissance dans la fabrication d’engrais, le Canada peut aider au maintien du rendement des récoltes dans les autres pays.
  • À court terme, le Canada a la capacité d’apporter un peu de répit au marché des engrais potassiques. Néanmoins, il faudra des investissements massifs pour accroître la production d’engrais azotés..
  • En résumé, boosting fertilizer production is one way Canada can make a difference—but it will demand a careful consideration of the impact on costs and emissions.

La capacité du Canada à combler le manque de réserves alimentaires à l’échelle mondiale est limitée

La guerre en Ukraine, la pandémie et le choc énergétique ont complètement bouleversé le système alimentaire mondial. Les pays du Moyen-Orient et de l’Afrique subsaharienne se retrouvent au bord de la crise alimentaire. L’Ukraine et la Russie sont les principaux fournisseurs de céréales et d’oléagineux : leurs récoltes représentent environ 12 % des calories échangées dans le monde (l’équivalent de 2,54 % de la consommation mondiale annuelle de blé). Cependant, la guerre a perturbé la majeure partie des exportations russes, alors que, d’après des estimations, 20 millions de tonnes de céréales se retrouvent piégées dans des entrepôts ukrainiens.

Le Canada peut-il produire plus de nourriture pour pallier le manque ? Pas à court terme. Le Canada est le cinquième exportateur de produits agricoles et le quatrième exportateur de blé, derrière la Russie, l’Union européenne et les États-Unis. Les terres cultivables ont déjà été ensemencées pour la saison de croissance des cultures 2022 tandis que les agriculteurs canadiens ont fait part de leur intention de planter 7,2 % de blé supplémentaires.

Toutefois, malgré la grande superficie du Canada, il est impossible de convertir de larges portions de sol en terres cultivables supplémentaires en raison des obstacles posés par le climat et le terrain. En outre, l’expansion des exploitations agricoles implique des démarches coûteuses pour préparer les terres, se réapprovisionner et installer des systèmes d’irrigation. À l’avenir, la hausse de la productivité agricole va dépendre principalement de la mise en place de techniques et de technologies agricoles plus efficaces.

Mais le Canada est un chef de file mondial dans la production d’engrais

En revanche, le Canada peut faire en sorte que la situation ne dégénère pas, en comblant un autre vide important. Le Canada est un acteur majeur sur le marché mondial des engrais, et représente 40 % des exportations mondiales de potasse. Il est le plus grand producteur mondial de potasse, un type d’engrais potassique, et le 14e exportateur mondial d’engrais azotés.

Ces produits essentiels pour les agriculteurs du monde entier sont menacés de pénurie. La Russie, l’Ukraine et la Biélorussie représentent près de 15 % des exportations mondiales d’engrais azotés. Mais la guerre et les sanctions imposées à la Russie et à la Biélorussie ont stoppé en grande partie cette source d’approvisionnement. Face à la pénurie croissante, d’autres grands pays fournisseurs, dont la Chine, ont imposé des restrictions à l’exportation d’engrais afin de protéger la production nationale. Au total, ces perturbations touchent environ 20 % des exportations d’azote et d’engrais potassiques.

L’industrie canadienne des engrais a encore des opportunités de croissance et pourrait jouer un rôle d’atténuation majeur face à la crise alimentaire mondiale qui s’annonce. Par ailleurs, dans l’Est du Canada, 85 à 90 % des engrais azotés proviennent de Russie. Cela suggère qu’il est possible d’accroître l’autosuffisance dans cette région. Néanmoins, cela impliquerait de procéder à d’importantes mises à niveau des infrastructures de transport pour déplacer les approvisionnements depuis les provinces de l’Ouest.

Pour accroître la production, il faudra investir et gérer les émissions

Cela signifie qu’il faut trouver un équilibre fragile entre le maintien de la productivité agricole, l’augmentation de la production d’engrais et le respect des ambitions de zéro émission nette au Canada. Réunis en Saskatchewan, les principaux producteurs d’engrais nationaux et internationaux se sont engagés à réaliser des investissements dans le but d’accroître la production à court terme et d’augmenter la capacité et l’efficacité à long terme.

Mais augmenter la production n’est pas chose aisée. Au Canada, les usines tournent quasiment à plein régime. Et même s’il n’est pas absolument nécessaire de construire de nouvelles infrastructures pour accroître la production de potasse, des investissements importants seront nécessaires pour augmenter la production d’engrais azotés. Il faudra construire de nouveaux sites de production, et cela pourrait prendre au minimum un an.

Cela arrive au moment où le gouvernement fédéral s’est fixé pour objectif d’ici 2030, de réduire les émissions engendrées par l’utilisation d’engrais chimiques de 30 % et d’accélérer la transition des producteurs vers le zéro émission net. Le Canada a la capacité de s’imposer comme un des acteurs principaux du marché mondial des engrais. Toutefois, cela implique une évaluation coordonnée des répercussions ainsi que des efforts de la part de plusieurs paliers de gouvernement, d’agriculteurs et d’autres intervenants.

 



Benjamin Richardson est responsable de mener des recherches dans le cadre des articles des groupes Services économiques RBC et Leadership avisé RBC. Avant de se joindre à RBC, il a obtenu une maîtrise de l’Université de Toronto et a travaillé pour le Woodrow Wilson Centre, à Washington, D.C., où il a fait des recherches sur les relations entre le Canada et les États-Unis.

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