• Le nombre de résidents non permanents a explosé au Canada depuis la pandémie ; une hausse de 53 % a été observée entre 2020 et 2022.
  • Le système d’immigration à deux niveaux du Canada a attiré les bons candidats pour combler des pénuries de longue date dans des postes allant de fournisseur de services de garde à ingénieur en logiciels.
  • Cependant, il n’est pas aussi bien parvenu à anticiper les futures pénuries dans les secteurs confrontés à une vague imminente de départs à la retraite.
  • De plus, le nombre élevé de nouveaux arrivants devraient ralentir à mesure que le système s’adaptera aux perturbations causées par la pandémie.
  • En conclusion, À mesure que les tendances démographiques à long terme réduiront la main-d’œuvre, le Canada devra continuer à accueillir des résidents non permanents au rythme actuel. Il sera également important de recentrer le profil des nouveaux arrivants sur les compétences requises dans les secteurs touchés par le vieillissement.

Les résidents temporaires sont en grande partie responsables de la forte croissance démographique au Canada

Les résidents temporaires sont en passe de devenir un puissant moteur de la croissance de la population canadienne. En 2022, le Canada a délivré plus d’un million de permis de travail et d’études temporaires à des résidents éventuels.

Qu’est-ce qui explique ce bond ? Il est en partie attribuable à une période de rattrapage découlant des perturbations causées par la pandémie. Le nombre de permis de travail temporaires délivrés dans le cadre du Programme de mobilité internationale (PMI) du Canada a considérablement augmenté (+53 % depuis 2019), la moitié étant accordée à des réfugiés ukrainiens nouvellement arrivés. Or, même en excluant ce groupe, on constate un bond de 27 % dans l’octroi de permis au titre du PMI depuis 2019.

Le nombre d’étudiants étrangers au Canada a également augmenté considérablement. Quelque 1,25 million d’étudiants sont venus étudier au Canada entre 2020 et 2022, et 500 000 autres devraient arriver cette année. Au total, plus de la moitié des immigrants économiques aujourd’hui sont issus du bassin de résidents non permanents du Canada.

Une telle croissance démographique accroît forcément la demande pour une offre déjà limitée de logements et d’autres services. Les résidents non permanents ont un rôle à jouer dans le renforcement de la main-d’œuvre pour répondre à cette demande. Cependant, des mesures supplémentaires doivent être prises afin de faire correspondre leurs profils de compétences aux pénuries émergentes.

Les nouveaux arrivants peuvent combler les besoins actuels et futurs du marché du travail

Si les travailleurs qualifiés représentent plus que jamais une part prépondérante de la population immigrante, la répartition des résidents non permanents par profession n’a guère évolué depuis 2015, et ce, malgré les changements rapides qui se profilent sur le marché du travail.

En effet, la plupart des programmes tels que le programme des travailleurs étrangers temporaires viennent en aide aux secteurs confrontés à des pénuries persistantes de candidats canadiens. Les travailleurs agricoles représentent près de la moitié de tous les détenteurs de permis au titre du programme des travailleurs étrangers temporaires. Les fournisseurs de services de garde d’enfants, les surveillants de services alimentaires, les cuisiniers et les ouvriers dans les usines de transformation du poisson et de fruits de mer occupent également une place importante. La répartition par profession des détenteurs de permis au titre du PMI n’a guère changé non plus. Les analystes et consultants en systèmes d’information, les ingénieurs en logiciels et concepteurs de logiciel, les programmeurs et les développeurs de médias interactifs figurent en tête de liste depuis 2015.

La bonne nouvelle, c’est que la vague de nouveaux arrivants a contribué à réduire le nombre de postes vacants au Canada. Depuis le sommet atteint en mai 2022, le taux d’emplois vacants a diminué de plus de 21 % (200 000 postes) dans l’ensemble du pays. Les progrès ont toutefois été minimes dans certains secteurs, dont les soins de santé (où il manque un nombre ahurissant de 144 000 travailleurs), la construction (où il manque 64 000 travailleurs) et toute une série de secteurs touchés par le vieillissement.

Le prochain défi : cibler les secteurs touchés par le vieillissement et le secteur de la construction

L’augmentation post-pandémique du nombre de résidents non permanents devrait s’estomper au cours des cinq prochaines années, à mesure que la vague de réfugiés ukrainiens ralentira et que le système rattrapera les retards accumulés.

Cependant, le vieillissement de la population ne fera qu’accentuer la pression pour remplacer les travailleurs qui partent à la retraite. En effet, environ 4,3 millions de baby-boomers atteindront l’âge de la retraite d’ici 2033. Or, l’accroissement naturel de la population au Canada ne suffira pas à combler ces lacunes et, en l’absence d’immigration, le pays devra faire face à un déficit d’au moins 400 000 travailleurs. Au même moment, l’essor démographique entraînera une forte demande de logements, de soins de santé et d’autres biens et services.

Certains secteurs en pâtiront plus que d’autres. Environ un quart des travailleurs des secteurs de la fabrication, des services publics, des affaires, de la finance et de l’administration, ainsi que des métiers et des transports atteindront l’âge de la retraite dans la prochaine décennie, soit plus de 800 000 travailleurs. Et à mesure que la demande de logements poursuivra sa croissance, le Canada devra accélérer considérablement la construction dans les années à venir, ce qui nécessitera une forte augmentation du nombre de travailleurs dans ce secteur.

Le nombre de résidents non permanents admis au Canada devra rester supérieur aux niveaux prépandémiques un certain temps pour combler le déficit (actuellement, le Canada ne dispose pas de cible pour les résidents non permanents). La composition des nouveaux arrivants – y compris des résidents non permanents – devra également évoluer en fonction des nouvelles priorités. Et comme l’ont montré nos recherches antérieures, les pénuries persistantes sur le marché du travail dans divers secteurs rendent plus importante que jamais la réduction des obstacles en vue d’une meilleure utilisation des compétences des nouveaux arrivants.


Rachel Battaglia est économiste à RBC. Elle est membre du groupe d’Analyse macroéconomique et régionale et fournit des analyses des perspectives macroéconomiques provinciales. Elle est titulaire d’un baccalauréat en économie (avec distinction) de l’Université Western Ontario et d’une maîtrise en sciences de l’Amsterdam School of Economics.

Carrie Freestone est économiste à RBC. Elle produit des analyses sur le marché du travail et est membre du groupe d’Analyse régionale, où elle contribue à l’établissement des perspectives macroéconomiques de la province.

Naomi Powell, directrice de la rédaction, Services économiques et leadership avisé RBC, dirige la publication de Point clé.

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