Les taux d’intérêt continueront de dicter l’orientation du marché résidentiel au Canada en 2024, les deux semestres présentant des portraits différents. Nous nous attendons à ce que l’activité reste morose et à ce que les prix demeurent faibles au début de l’année, tandis que la Banque du Canada maintiendra son taux directeur à un sommet jamais vu en deux décennies et que de nombreux acheteurs potentiels ne pourront accéder à la propriété. Cependant, le début des baisses de taux vers la mi-année devrait accélérer les choses au cours du second semestre, voire avant. Il y aura beaucoup de demande accumulée à satisfaire sur le marché une fois que la confiance sera restaurée, ce qui pourrait stimuler rapidement l’activité. Toutefois, les mauvaises conditions d’accessibilité freineront la reprise et la rendront graduelle. La période la plus propice pour les acheteurs ne sera probablement pas avant que les taux d’intérêt aient chuté de façon marquée, ce que nous prévoyons vers la fin de 2024, début 2025. C’est particulièrement le cas pour les acheteurs d’une première maison qui sont peut-être plus limités financièrement.

Amélioration de l’offre

L’amélioration des perspectives de ventes ne peut qu’attirer davantage de vendeurs. Le choc de versement lié aux renouvellements de prêts hypothécaires pourrait aussi inciter un plus grand nombre de propriétaires à mettre leurs propriétés sur le marché. Un afflux de vendeurs permettrait de maintenir l’équilibre entre l’offre et la demande et d’atténuer toute pression à la hausse sur la demande. Les stocks de logements à vendre se sont reconstitués au cours des deux dernières années après avoir atteint des creux historiques plus tôt durant la pandémie.

Le marché sera un peu plus achalandé en 2024

Nous prévoyons que les reventes de logements au Canada bondiront de 9,2 % d’une année sur l’autre pour s’établir à 484 400 unités en 2024, ce qui annulera en partie les baisses massives de 25,1 % en 2022 et de 11,1 % en 2023. Ce nombre de transactions serait encore inférieur au niveau atteint avant la pandémie en 2019 (490 900 unités). Nous prévoyons que la reprise se raffermira en 2025 pour s’établir à 562 100 unités, soit un gain de 16 %.

Plus de place à la reprise en Colombie-Britannique et en Ontario

Le marché du logement varie considérablement d’un bout à l’autre du pays, et il est peu probable que cela change au cours de l’année à venir. Les coûts écrasants de propriété d’un logement ont considérablement ralenti les reventes en Colombie-Britannique et en Ontario. Elles ne sont guère plus vigoureuses au Québec. Les autres marchés provinciaux se sont toutefois montrés généralement résilients. L’activité demeure près ou au-dessus des niveaux d’avant la pandémie en Alberta, en Saskatchewan, au Manitoba et dans la plupart des provinces de l’Atlantique.

La reprise prend déjà forme en Alberta et en Saskatchewan

Nous prévoyons que les taux d’intérêt moins élevés au second semestre de 2024 stimuleront l’activité d’un océan à l’autre. En fait, une tendance à la hausse du marché se dessine déjà en Alberta et en Saskatchewan, positionnant les deux provinces pour une croissance des reventes supérieure à la moyenne de 13,5 % et de 9,4 % cette année, respectivement.

Reprise générale au deuxième semestre

D’autres provinces devraient changer d’orientation d’ici l’été. Nous prévoyons que les transactions résidentielles reprendront légèrement cette année en Colombie-Britannique (6,4 %) et en Ontario (7,7 %). Elles seront encore plus importantes à l’est de l’Ontario, avec des taux de croissance aussi élevés que 15,8 % à l’Île-du-Prince-Édouard, 15,5 % en Nouvelle-Écosse et 10,2 % au Québec. À notre avis, les baisses de taux et de prix devront être plus importantes pour être significatives pour les acheteurs sur les marchés plus chers.

Pas de changement rapide des prix

Nos prévisions de prix tablent sur un recul de 1,0 % de l’indice national RPS Home Price, qui a perdu 2,6 % en 2023. Selon nous, le redressement du marché aura une incidence plus importante en 2025, alors que l’indice RPS Home Price devrait gagner 3,1 %. Dans ce scénario, l’indice national demeurerait en deçà de son sommet de 2022 tout au long de la période de projection de deux ans.

Provinces à différents points du cycle des prix

Les prix des logements dans l’ensemble des provinces seront contrastés cette année. Nous prévoyons des gains en Alberta (2,2 %), au Nouveau-Brunswick (0,7 %), en Nouvelle-Écosse (0,2 %) et en Saskatchewan (0,1 %). Toutefois, il y aura des pertes en Ontario (-2,0 %), au Manitoba (-1,8 %), à Terre-Neuve-et-Labrador (-0,6 %), en Colombie-Britannique (-0,3 %) et au Québec (-0,2 %). Aucun changement n’est prévu pour l’Île-du-Prince-Édouard.


L’année prochaine semble plus uniforme, avec des hausses modérées des prix prévues dans chaque province.

Croissance démographique et mauvaises conditions d’accessibilité

Les principales forces travaillent dans des directions opposées sur le marché du logement. D’une part, la croissance démographique maintient une forte demande sous-jacente de logements (y compris en location). D’autre part, les coûts élevés du logement empêchent de nombreux Canadiens d’accéder à la propriété. Les conditions d’accessibilité devraient s’assouplir en 2024, une fois que les taux d’intérêt auront chuté de façon significative. L’importante détérioration de l’accessibilité, attribuable à la flambée des prix survenue plus tôt durant la pandémie et à la hausse des taux d’intérêt observée depuis mars 2022, a été la force dominante au cours des deux dernières années, plongeant le marché dans une profonde correction et entraînant une importante augmentation de la demande accumulée.


Nous croyons que la récente décision du gouvernement fédéral de plafonner la délivrance de permis d’études aux étudiants étrangers pendant deux ans aura une incidence marginale sur la demande globale d’acheteurs de logements au Canada. Les pressions exercées sur les marchés locatifs locaux près des établissements d’enseignement postsecondaire en Ontario et en Colombie-Britannique pourraient cependant s’atténuer.

Choc de versement lié aux renouvellements de prêts hypothécaires

Les fortes augmentations de versement qui attendent les détenteurs de prêts hypothécaires à taux fixe au moment du renouvellement frapperont durement de nombreux Canadiens. Ces augmentations pourraient être trop élevées pour certains propriétaires qui pourraient devoir vendre. Le risque d’une vague de vendeurs en difficulté nous paraît toutefois limité. La plupart des détenteurs de prêts hypothécaires ont été soumis à un test de résistance rigoureux contre une hausse des taux – dans le cadre duquel ils doivent être admissibles à un taux d’au moins deux points de pourcentage au-dessus du taux obtenu – lors de la souscription. En fait, ce facteur prudent a contribué de façon importante au maintien des défaillances hypothécaires à un creux historique au Canada jusqu’à maintenant. Quoi qu’il en soit, les stocks de logements à vendre peuvent encore considérablement augmenter avant d’atteindre des niveaux problématiques.

La construction résidentielle est la clé d’un équilibre à long terme

Bien que nous ne nous attendions pas à ce que la croissance démographique actuelle se maintienne, les facteurs démographiques devraient rester importants dans un avenir prévisible au Canada. Ils pourraient facilement stimuler le marché du logement à un niveau encore inconfortable au terme du repli cyclique. Cela dépendra de la réponse de l’offre. Nous estimons que le Canada devra faire croître son parc de logements d’une moyenne de 315 000 unités chaque année d’ici 2030, juste pour suivre la formation de ménages. Cela signifie que le rythme actuel des unités achevées au cours des dernières années (entre 220 000 et 240 000 unités par année) doit s’accélérer de plus du tiers. Inutile de dire que le défi est de taille, surtout si l’on tient compte des enjeux de main-d’œuvre auxquels le secteur de la construction est confronté.




Le présent article vise à offrir des renseignements généraux seulement et n’a pas pour objet de fournir des conseils juridiques ou financiers, ni d’autres conseils professionnels. Veuillez consulter un conseiller professionnel en ce qui concerne votre situation particulière. Les renseignements présentés sont réputés être factuels et à jour, mais nous ne garantissons pas leur exactitude et ils ne doivent pas être considérés comme une analyse exhaustive des sujets abordés. Les opinions exprimées reflètent le jugement des auteurs à la date de publication et peuvent changer. La Banque Royale du Canada et ses entités ne font pas la promotion, ni explicitement ni implicitement, des conseils, des avis, des renseignements, des produits ou des services de tiers.