- Les taux d’intérêt élevés ont propulsé les coûts de propriété à un nouveau sommet au quatrième trimestre de 2023 : Un ménage qui gagne le revenu médian a dû consacrer pas moins de 63,5 % de ses revenus au paiement des coûts de propriété d’un logement moyen aux prix courants, contre 61,8 % au troisième trimestre.
- La flambée des charges d’intérêts a largement éclipsé une légère baisse des prix à l’échelle nationale : Le versement hypothécaire mensuel pour la propriété composite (évaluée à 796 300 $) a augmenté de plus de 125 $ (3,3 %) au dernier trimestre pour s’établir à 3 990 $. Cette hausse s’est produite malgré un recul de 0,5 % du prix de la propriété composite d’un trimestre sur l’autre.
- L’accessibilité s’est détériorée dans tous les marchés que nous suivons : Vancouver, Victoria et Toronto ont connu la plus forte détérioration, ce qui a exacerbé encore les tensions. La situation est également devenue plus difficile à Ottawa, à Montréal et à Halifax, où l’accessibilité frôle ou a atteint les pires niveaux jamais enregistrés.
- Le virage anticipé de la Banque du Canada laisse espérer un répit : À notre avis, la probabilité croissante d’une réduction des taux à partir du milieu de l’année marquera un tournant pour l’accessibilité à la propriété au Canada. Nous nous attendons à ce que la baisse des coûts d’emprunt efface en partie les pertes massives subies pendant la pandémie. Cependant, toute amélioration au cours de l’année à venir devrait être modeste et ne pas satisfaire les acheteurs dont le budget est limité.
Le budget des chercheurs de maisons demeure fortement limité
La campagne historique de relèvement des taux lancée par la Banque du Canada en mars 2022 continue de peser lourdement sur le marché du logement de notre pays, malgré une pause depuis l’été. Les taux élevés ont accentué les pressions qui s’exercent sur de nombreux détenteurs d’hypothèques devant composer avec de fortes augmentations de versement au moment du renouvellement.
Soulignons que les taux élevés ont grevé sérieusement le budget d’achat des chercheurs de maisons. Selon nos estimations, le budget maximal d’un ménage qui gagne le revenu médian (85 400 $ à la fin de 2023) a diminué de 22 % depuis le premier trimestre de 2022 pour s’établir un peu en deçà de 500 000 $ (en supposant une mise de fonds de 20 % et une période d’amortissement de 25 ans). Les prix de l’immobilier, quant à eux, n’ont baissé que de 1,8 % au cours de la même période. Il n’est pas étonnant que la demande des acheteurs ait autant diminué. La capacité de nombreux Canadiens à accéder au marché du logement s’est grandement amoindrie.
Et il n’est pas surprenant que de nombreux chercheurs de maisons sur la touche attendent avec impatience des baisses de taux. L’annulation des hausses antérieures contribuera à rétablir en partie le pouvoir d’achat et à réduire l’écart par rapport aux prix du marché, à condition que ces derniers ne se redressent pas trop rapidement.
Amélioration des perspectives de l’accessibilité
Nous nous attendons à ce que les acheteurs canadiens obtiennent ce qu’ils souhaitent d’ici le milieu de l’année. En fait, une amélioration de l’accessibilité pourrait survenir plus tôt si les taux d’intérêt à long terme s’assouplissaient avant le changement de cap de notre banque centrale et si le revenu des ménages continuait de croître à un rythme soutenu. Les perspectives s’éclairciront à mesure que les réductions de la Banque du Canada s’intensifieront l’an prochain.
Cependant, les conditions demeureront extrêmement difficiles pendant un (long) moment
Le potentiel d’amélioration au cours de l’année à venir, bien que suffisant pour raviver l’enthousiasme de certains acheteurs, sera faible par rapport à la détérioration dramatique de l’accessibilité survenue pendant la pandémie. Selon notre scénario de base, la part du revenu moyen des ménages nécessaire pour couvrir les coûts de propriété atteindrait seulement les niveaux de la mi-2022 d’ici 2025, facilitant à peine l’accès à la propriété de la plupart des acheteurs potentiels. Il faudra probablement des années pour que de nombreux grands marchés du Canada retrouvent un degré d’accessibilité acceptable. Dans ce contexte, nous nous attendons à ce que le marché du logement se redresse lentement au début, puis rapidement lorsque les baisses de taux d’intérêt s’accumuleront. Pour connaître nos dernières prévisions, consultez Perspectives du marché résidentiel au Canada : un marché dichotomique en 2024.
Victoria – Acheteurs, certains propriétaires sont pris en étau
Les pressions extrêmes liées à l’accessibilité se sont encore aggravées au cours des derniers mois de 2023. La mesure globale d’accessibilité de RBC pour Victoria a bondi de 4,0 points de pourcentage de plus au quatrième trimestre pour atteindre un sommet record de 80,2 %. (Une augmentation de cette mesure indique une détérioration de l’accessibilité à la propriété.) Ces pressions pèsent lourdement sur les marchés en ce début de 2024, freinant la reprise de la demande et tirant les prix vers le bas (quoique légèrement). Certains propriétaires actuels, pris en étau, pourraient aussi choisir de vendre. Les niveaux des nouvelles inscriptions, bien que loin d’être excessifs, dépassent ceux d’avant la pandémie depuis l’automne. De ce fait, les conditions de l’offre et de la demande se sont assouplies dernièrement. Nous prévoyons que les prix continueront de fléchir légèrement à court terme.
Région de Vancouver – En pleine crise
Les perspectives pour l’achat d’une propriété, depuis longtemps problématiques dans la région, atteignent désormais de véritables niveaux de crise. Il n’a jamais été aussi coûteux de posséder un logement au Canada, quels que soient l’endroit et le moment, qu’à Vancouver au quatrième trimestre. La part du revenu médian nécessaire pour couvrir les coûts de propriété (mesure globale d’accessibilité de RBC) s’établit à un niveau stupéfiant de 106,4 %. Autrement dit, seuls quelques particuliers à revenu élevé ont les moyens d’acheter une propriété, ou alors un patrimoine considérable doit être amassé (ou reçu) à des fins de mise de fonds. Comme cette situation réduit sensiblement le bassin d’acheteurs potentiels sur le marché, l’activité est restée faible et les prix ont stagné récemment. Nous ne prévoyons pas de changement important dans les mois à venir.
Calgary – Le recul de l’accessibilité pourrait affaiblir la vigueur du marché
Calgary est le point chaud de l’immobilier en ce moment au Canada. Les reventes dans la région sont en effervescence et les prix connaissent la progression la plus rapide au pays. Néanmoins, l’accessibilité à la propriété devient de plus en plus difficile pour de nombreux acheteurs. La mesure globale d’accessibilité de RBC s’est considérablement détériorée au cours des trois dernières années, atteignant à la fin de 2023 son pire niveau (48,3 %) depuis 2007. Grâce au fort dynamisme de l’économie provinciale et à l’explosion démographique, la détérioration ne nuit pas à la vitalité du marché pour l’instant. Toutefois, elle pourrait freiner la reprise à l’avenir si la tendance à la détérioration persiste.
Edmonton – Les conditions se détériorent, mais demeurent globalement raisonnables
À ce stade, le contexte économique et démographique favorable l’emporte aussi sur l’érosion du pouvoir d’achat des acheteurs sur le marché d’Edmonton. Le niveau d’activité est élevé d’un point de vue historique et demeure en hausse. Après quelques soubresauts à la fin de l’année dernière, les prix se sont accrus jusqu’à présent cette année. Les coûts de propriété, bien que globalement raisonnables, sont devenus plus élevés pour les acheteurs potentiels. Au quatrième trimestre, ils représentaient 36,8 % du revenu médian des ménages, soit un sommet de 13 ans. Nous prévoyons que les baisses de taux d’intérêt à venir empêcheront une nouvelle détérioration des conditions et soutiendront le dynamisme du marché au cours de la période à venir.
Saskatoon – Les taux élevés portent ombrage aux acheteurs
Le marché poursuit sur sa lancée, malgré un léger ralentissement depuis l’été. Ces derniers mois, les reventes de logements ont dépassé d’environ 20 % les niveaux d’avant la pandémie. Toutefois, les taux d’intérêt élevés portent de plus en plus ombrage aux acheteurs. Les coûts de propriété ont grimpé à des niveaux jamais vus depuis 15 ans dans la région. La mesure globale d’accessibilité de RBC a augmenté au cours de sept des huit derniers trimestres, incluant les trois derniers. Au quatrième trimestre, la mesure a progressé de 1,6 point de pourcentage pour s’établir à 37,8 %. Nous pensons que les acheteurs, dont le budget subit des pressions croissantes, repousseront toute appréciation des prix à court terme.
Regina – Le marché poursuit sur sa lancée grâce à la faiblesse relative des coûts de propriété
Le volume des reventes s’est considérablement redressé depuis le printemps 2023, et a presque retrouvé son niveau d’avant le début du relèvement des taux par la Banque du Canada en mars 2022. Les acheteurs de la région ne sont pas à l’abri des tensions croissantes liées à l’accessibilité, mais le fardeau auquel ils font face est l’un des plus légers parmi tous les marchés que nous suivons. La mesure globale d’accessibilité de RBC se situait à 30,4 % au dernier trimestre, uniquement surpassée par celle de St. John’s (28,7 %). La chute des prix des logements a contribué à atténuer l’incidence de la hausse des taux en 2023. Un resserrement des conditions de l’offre et de la demande depuis l’automne laisse toutefois entrevoir un changement de direction de la valeur des propriétés au cours de la période à venir.
Winnipeg – Les pressions qui s’exercent sur les budgets maintiennent les acheteurs en alerte
La reprise de l’an dernier a stagné. Les reventes sont incapables de passer à la vitesse supérieure, se situant à environ 10 % sous les niveaux d’avant la pandémie. En outre, les prix ont légèrement baissé depuis l’automne. Il ne fait aucun doute que les taux d’intérêt élevés et la détérioration de l’accessibilité à la propriété dans la région préoccupent de nombreux acheteurs potentiels. Au dernier trimestre, la mesure globale d’accessibilité de RBC a atteint son pire niveau (32,8 %) en plus de 30 ans. Nous nous attendons à ce que les pressions qui s’exercent sur les budgets maintiennent les acheteurs en alerte pendant un certain temps. Il ne s’agit pas d’un contexte propice à de fortes hausses des prix.
Région de Toronto – Les tensions extrêmes ne se dissipent pas
La montée en flèche des charges d’intérêts demeure très problématique pour les acheteurs de la région de Toronto, dont beaucoup sont incapables de franchir la barre extrêmement élevée de l’accession à la propriété. Au quatrième trimestre, la mesure globale d’accessibilité de RBC a atteint son pire niveau jamais enregistré (84,8 %). L’énorme fardeau que cela représente limite, en définitive, les reventes à des niveaux historiquement bas et pèse sur les prix. Le marché a néanmoins semblé se ressaisir vers la fin de 2023 et le début de 2024, alors que l’activité a légèrement augmenté et que les prix se sont stabilisés. Nous prévoyons toutefois que toute reprise sera lente et potentiellement cahoteuse au début. Il faudra plusieurs réductions de taux pour libérer dans une large mesure la demande accumulée.
Ottawa – Les acheteurs font face à des vents contraires
L’activité s’est raffermie après le creux cyclique de l’automne, mais reste loin d’être robuste. Au début de l’année, les reventes étaient toujours inférieures de près de 15 % à leurs niveaux tout juste avant la pandémie. Les acheteurs ont du mal à entrer sur le marché, car les taux et les prix élevés minent leur capacité à acheter un logement. Au quatrième trimestre, la mesure globale d’accessibilité de RBC a atteint 49,9 %, un sommet record pour la région. En raison de ces entraves, de nombreux acheteurs ne sont pas en mesure d’offrir des prix élevés, voire de présenter une offre. Il n’est donc pas surprenant que la valeur des propriétés ait diminué depuis l’automne. Cette tendance devrait se poursuivre à court terme.
Région de Montréal – Le marché remonte progressivement
La reprise du marché s’est remise sur les rails au début de 2024 après avoir fait marche arrière à l’automne. Une hausse de l’offre pourrait expliquer la reprise de l’activité, puisque les nouvelles inscriptions ont rebondi dernièrement au-dessus des niveaux d’avant la pandémie. Cette situation offre plus d’occasions d’achat aux chercheurs de maisons, dont le pouvoir d’achat est considérablement affaibli par les taux d’intérêt élevés. La mesure globale d’accessibilité de RBC a atteint un sommet record de 53,3 % au quatrième trimestre, un niveau qui limite le bassin d’acheteurs potentiels. Ce facteur explique la morosité persistante de la demande malgré la reprise. Les reventes de logements demeurent encore inférieures de plus de 25 % aux niveaux d’avant la pandémie. Nous nous attendons à ce que le marché continue de progresser graduellement.
Québec – Les tensions accrues ne freinent pas l’activité
Les conditions d’accessibilité n’ont jamais été aussi défavorables depuis des décennies, mais elles se comparent encore avantageusement à la plupart des marchés que nous suivons. À 35,7 %, la mesure globale d’accessibilité de RBC dépasse à peine la moitié de la moyenne canadienne. De toute évidence, la hausse des coûts de propriété freine peu les acheteurs, voire pas du tout à ce stade. Le volume d’opérations demeure bien supérieur au niveau de l’année précédente, et l’offre généralement restreinte contribue à maintenir les prix à la hausse. Nous voyons peu de facteurs susceptibles de changer ces tendances au cours de la période à venir.
Saint John – Trajectoire lente et cahoteuse
Comme ailleurs au Canada, le marché de Saint John pâtit de la hausse des charges d’intérêts. Les reventes de logements ont nettement ralenti depuis le début de 2022 et ont affiché une certaine volatilité dernièrement. Leur niveau est inférieur d’environ 20 % à celui d’avant la pandémie. L’accessibilité à la propriété n’est pas mauvaise, puisqu’elle demeure l’une des meilleures sur les marchés que nous suivons. Toutefois, elle s’est nettement détériorée au cours des deux dernières années, atteignant son pire niveau depuis des décennies à la fin de 2023. La mesure globale d’accessibilité de RBC a crû de 1,3 point de pourcentage pour s’établir à 31,4 % au quatrième trimestre. Les prix des maisons ont subi des pressions baissières au cours des derniers mois, et nous croyons que cette situation devrait persister à court terme.
Halifax – Les coûts de propriété records constituent un obstacle important
La reprise est peut-être en cours, mais l’activité demeure faible à Halifax. Le volume des opérations au début de 2024 était encore inférieur de plus de 25 % aux niveaux (élevés) d’avant la pandémie. Les coûts de propriété records sont sans aucun doute le problème. La mesure globale d’accessibilité de RBC a grimpé à 45,3 % au quatrième trimestre, dépassant de loin la moyenne à long terme de 31,9 %. Ces coûts élevés limitent considérablement le nombre d’acheteurs et leur budget. Les prix des maisons ont donc chuté ces derniers mois. Nous nous attendons à ce qu’ils poursuivent leur repli au cours des prochains mois.
St. John’s – La baisse de l’offre est le principal problème
La faiblesse de l’offre a probablement plus d’importance pour le marché que la piètre accessibilité à ce stade. Ces derniers temps, les nouvelles inscriptions et l‘offre ont chuté près de leur plus bas niveau en dix ans, laissant de nombreux acheteurs en manque d’options. Ce n’est pas que les coûts de propriété n’ont pas d’effet défavorable. C’est simplement que les pressions sont plus faibles que dans tous les autres marchés que nous suivons. La mesure globale d’accessibilité de RBC a atteint un creux national de 28,7 % au quatrième trimestre, et elle n’est pas loin de sa moyenne à long terme de 26,3 %. Bien que le marché soit plus calme qu’au plus fort de la pandémie, il demeure beaucoup plus actif qu’à presque tout autre moment avant 2020. Nous croyons que la tendance haussière actuelle des prix persistera au cours de la période à venir.
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Robert Hogue est membre du l’équipe Économique et leadership avisé RBC, se spécialisant dans l’analyse et les prévisions pour le marché de l’habitation canadien et les économies provinciales. Il compte parmi ses publications Tendances immobilières et accessibilité à la propriété, Perspectives provinciales et l’analyse des budgets provinciaux. Dans ses fonctions, il est fréquemment appelé à commenter l’évolution de la conjoncture économique auprès de la direction de RBC, de ses clients et des médias.
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