L’économie canadienne a continué d’être à la traîne par rapport à ses pairs à l’échelle mondiale. La baisse de la production par habitant au cours de sept des huit derniers trimestres a ramené le revenu moyen par personne à son niveau des dernières décennies et le taux de chômage a augmenté plus que dans les autres économies avancées.

Le Canada n’est pas « officiellement » en récession, puisque le taux d’immigration élevé accroît le nombre de consommateurs dans le pays. Cependant, le produit intérieur brut par habitant et le taux de chômage représentent mieux ce que les ménages et les travailleurs individuels vivent dans l’économie actuelle, et à cet égard, il semble bien qu’il s’agisse d’une récession.

La bonne nouvelle, c’est que l’inflation diminue à mesure que l’économie fléchit, ce qui a permis à la Banque du Canada de commencer à assouplir sa politique monétaire en réduisant le taux du financement à un jour de 25 points de base à trois reprises consécutives depuis le mois de juin. Les taux d’intérêt sont encore suffisamment élevés pour ralentir la croissance économique plutôt que de la stimuler. Les décalages entre les variations des taux d’intérêt en vigueur sur le marché et les taux d’emprunt réels des ménages signifient que les coûts du service de la dette continueront d’augmenter, en particulier pour les ménages qui renouvellent des hypothèques à taux fixe dont les taux remontent aux niveaux exceptionnellement bas atteints pendant la pandémie. Pourtant, nous pensons que la Banque du Canada continuera à abaisser progressivement les taux d’intérêt, ce qui contribuera à limiter l’ampleur du choc de versement des consommateurs.

La demande des marchés émergents maintient les prix des marchandises à un niveau plancher

À l’échelle mondiale, la conjoncture économique a poursuivi son repli progressif, mais le rythme n’a pas encore montré de signes d’effondrement imminent. La croissance du PIB reste positive, sous l’impulsion des marchés émergents, même si la croissance chinoise continue de ralentir. En Europe, l’économie allemande souffre de la faiblesse générale de l’industrie manufacturière mondiale, mais la croissance dans l’ensemble de la zone euro s’est maintenue grâce au renforcement de l’activité du secteur des services, qui a stimulé la production en Espagne et en France. Les prix des marchandises ont reculé, mais restent suffisamment élevés pour soutenir le revenu des provinces canadiennes productrices de ressources naturelles.

L’économie américaine continuera à s’affaiblir, sans pour autant s’effondrer, bien que des risques pèsent encore sur elle

Les marchés financiers s’inquiètent de plus en plus de la durabilité de la reprise économique aux États-Unis. Le taux de chômage américain demeure faible, mais il a progressivement évolué à la hausse, ce qui, historiquement, ne se produit que lors des récessions dans ce pays. Nous avons suffisamment de raisons de penser que cette fois-ci est « différente », compte tenu du déficit budgétaire inhabituel et exceptionnellement élevé du gouvernement américain, qui soutient la demande du pays. Dans ce contexte, la Réserve fédérale américaine continuera à abaisser les taux d’intérêt. Nous prévoyons un rythme de réduction graduel et limité : 125 points de base au total pour ramener le taux cible des fonds fédéraux dans une fourchette de 4 % à 4,25 % d’ici le deuxième trimestre de 2025. Toutefois, la Fed est clairement disposée à aller plus loin si la situation économique s’avère moins favorable que prévu.

Les risques liés aux perspectives américaines restent orientés à la baisse, et l’incertitude quant à la future politique commerciale des États-Unis à l’issue des élections de novembre constitue un risque particulièrement important pour le Canada. La croissance américaine a été stimulée en grande partie par les dépenses des ménages et du gouvernement, et les retombées sur le Canada ont été restreintes. En effet, aucun de ces deux secteurs américains ne comprend beaucoup d’importations. Le secteur manufacturier américain (où les liens avec le Canada sont beaucoup plus étroits) a enregistré de mauvais résultats et serait le plus directement menacé en cas de forte hausse des droits de douane des États-Unis. Néanmoins, nous nous attendons à ce que la croissance du PIB américain ralentisse et à ce que le taux de chômage s’accroisse au cours de l’année à venir, mais à ce que l’économie évite de justesse une récession.

L’allongement de la durée de recherche d’emploi fait grimper le taux de chômage au Canada

Le marché du travail canadien ralentit à un rythme et avec une ampleur comparables à ceux des récessions précédentes. Cependant, la correction du marché du travail est très différente de ce qu’elle est habituellement. Environ 80 % de la hausse du taux de chômage est attribuable à la population âgée de moins de 35 ans et, de manière disproportionnée, aux étudiants et aux nouveaux diplômés, qui ont besoin de plus de temps pour trouver leur premier emploi, plutôt qu’à des licenciements. C’est pourquoi le taux de chômage a augmenté alors que le nombre de salariés n’a pas diminué.

L’incidence économique plus générale d’une hausse du taux de chômage due à l’allongement de la durée de recherche d’emploi pour les jeunes travailleurs est différente. La proportion de licenciements est plus faible que d’habitude, ce qui signifie que le choc de revenu immédiat lié à un taux de chômage plus élevé est moins important que si l’augmentation touchait plus largement l’ensemble de la population. Toutefois, cette situation se traduit aussi par une diminution de l’aide gouvernementale automatique, car cette génération est moins susceptible de bénéficier de programmes de soutien, comme l’assurance-emploi. C’est aussi probablement en grande partie la raison pour laquelle les baisses de taux de la Banque du Canada n’ont pas encore sorti le marché immobilier canadien de son marasme. Les logements sont encore très inabordables, les taux d’intérêt restent élevés et la population des acheteurs typiques d’une première propriété est confrontée à un taux de chômage nettement plus élevé.

Prévisions provinciales

L’Ontario (0,7 %) et la Colombie-Britannique (0,9 %) demeurent à la queue du classement de la croissance par province pour 2024. Nous avons toutefois revu légèrement à la hausse nos prévisions pour ces deux provinces en raison d’une activité plus vigoureuse que prévu au début de l’année.

L’économie du Québec (1,1 %) montre des signes de redressement après une année 2023 particulièrement faible, la croissance du PIB réel se situant tout juste au-dessus de la moyenne nationale cette année.

Dans l’Est, la vigueur des dépenses des ménages et de l’activité de construction continue de soutenir la croissance économique dans la plupart des provinces de l’Atlantique. C’est notamment le cas à Terre-Neuve-et-Labrador (1,5 %), dont le secteur pétrolier connaîtra bientôt un regain d’activité grâce à la remise en service des quatre navires de production extracôtiers d’ici la fin de l’année.

Une hausse des marchés de marchandises est de bon augure pour l’Alberta (2,7 %) et la Saskatchewan (1,9 %). L’augmentation de la capacité de transport par pipeline découlant du projet d’expansion de Trans Mountain a renforcé les perspectives du secteur pétrolier et gazier de l’Alberta, tandis qu’en Saskatchewan, la hausse de la demande de potasse a soutenu l’activité du secteur minier ainsi que les dépenses en immobilisations.

COLOMBIE-BRITANNIQUE – Aux prises avec des conditions difficiles

Nous restons d’avis que la Colombie-Britannique éprouvera plus de difficultés que la plupart des autres provinces en 2024. Cette situation s’explique par la forte sensibilité des ménages britanno-colombiens aux taux d’intérêt élevés et l’achèvement de grands projets d’investissement dans la province.

Malgré la diminution des dépenses et l’affaiblissement de l’activité de construction, l’emploi a bien tenu le coup au printemps, ce qui a limité la hausse du taux de chômage. Comme nous jugions auparavant que la détérioration du marché du travail serait plus rapide, nous avons un peu relevé notre prévision de croissance pour 2024, qui est passée de 0,7 % à 0,9 %.

Les dépenses de consommation ont été faibles cette année en Colombie-Britannique. Les ventes au détail nominales par habitant continuent de chuter par rapport à leur niveau de l’an dernier. La perspective de nouvelles baisses de taux laisse toutefois entrevoir un redressement probable (quoique modeste) plus tard cette année.

Les investissements ont été – et demeurent – l’autre principal facteur de stress pour la croissance provinciale. La baisse des dépenses en immobilisations se poursuit en C.-B. à la suite de l’achèvement de projets majeurs comme l’expansion de Trans Mountain et le terminal de LNG à Kitimat. Au dernier trimestre de 2023, pour chaque dollar d’investissement arrivé à terme, moins de 50 cents étaient investis dans de nouvelles constructions.

Par ailleurs, le pipeline de projets semble relativement vide, car le ralentissement du marché du logement fait hésiter les promoteurs. Les entreprises semblent aussi attendre des baisses de taux plus importantes ou d’autres mesures incitatives avant de prendre des décisions d’investissement.

ALBERTA – Résilience face aux feux de forêt dévastateurs

De graves feux de forêt ont ravagé certaines parties de la province au printemps et à l’été. Les incendies ont entraîné l’évacuation de résidents et l’interruption des activités dans divers secteurs économiques. Bien que dévastatrices pour les collectivités touchées, ces perturbations ne devraient pas éclipser la force d’autres secteurs de base.

L’important secteur pétrolier et gazier de la province poursuit sa reprise dans un contexte de rebond de la demande mondiale. Ce facteur, allié à une activité de construction robuste, devrait faire grimper la croissance du PIB réel à 2,7 % cette année, ce qui place l’Alberta au sommet du classement de la croissance par province. Il s’agit d’une révision à la hausse par rapport au taux de 1,7 % que nous avions prévu en juin.

En Alberta, la saison des incendies de forêt s’est amorcée de vilaine façon cette année. Il y a eu plus de 1 000 feux de forêt au cours des huit premiers mois de 2024, soit un peu plus que le nombre total enregistré à la même période l’année précédente. La superficie brûlée a toutefois été plus petite, ce qui témoigne d’une saison plus active, mais moins destructrice.

La vigueur d’autres secteurs de l’économie a plus que compensé les difficultés de la province imputables aux phénomènes météorologiques extrêmes. Les marchés résidentiels locaux, particulièrement à Calgary et à Edmonton, comptent parmi les plus effervescents du pays. Depuis le début de l’année, les reventes (+14 %) ont augmenté plus que dans toute autre province, soit à un rythme presque quatre fois supérieur à la moyenne nationale.

Le secteur pétrolier de l’Alberta profite de l’expansion de Trans Mountain et utilise déjà la moitié de la capacité de l’oléoduc, qui a presque triplé. Comme davantage de pétrole canadien rejoint la côte à un rythme accéléré, l’écart entre le Western Canadian Select (WCS) et le Western Texas Intermediate (WTI) s’est rétréci. Par conséquent, les producteurs de pétrole albertains peuvent relever leurs prix et plus de revenus sont injectés dans l’économie provinciale.

Des conditions de culture plus favorables devraient également permettre au secteur agricole de la province de se redresser, ce qui renforcera encore davantage l’économie provinciale en 2024.

Saskatchewan – Un nouvel essor

Nous restons optimistes à l’égard des perspectives de croissance de la Saskatchewan cette année. Les marchés mondiaux des engrais ont poursuivi leur rebond en 2024, comme prévu. Cette vigueur alimente l’activité dans le secteur minier de la province et soutient les dépenses en immobilisations, à mesure que les grandes entreprises minières poursuivent leurs projets d’expansion.

La robustesse des marchés de marchandises et une accélération de la croissance de l’emploi ont aussi contribué à redynamiser les dépenses de consommation (et de façon plus marquée que prévu). En fait, une vigueur accrue du côté des ménages a entraîné une légère révision à la hausse de notre prévision de croissance pour 2024, qui passe de 1,7 % à 1,9 %.

La production de potasse a déjà connu une belle remontée, ayant augmenté de 15 % jusqu’à maintenant cette année. La hausse des prix observée depuis janvier s’est accélérée ces derniers mois. Nous prévoyons que cette tendance se maintiendra pendant le reste de l’année, alors que la demande continue de se redresser.

Les perspectives optimistes pour le secteur minier de la province ont également eu une incidence positive sur le marché du travail. En effet, l’emploi (+2,7 % en cumul annuel) est en hausse depuis mars et affiche des gains notables d’un mois sur l’autre. Le nombre d’heures de travail a aussi augmenté, en particulier dans les secteurs des mines, du pétrole et du gaz.

Les entreprises prévoient augmenter leurs investissements de 14 % cette année, ce qui est beaucoup plus élevé que la hausse de 4,5 % prévue à l’échelle nationale. L’augmentation provient en majeure partie des secteurs des mines, du pétrole et du gaz, les travaux de construction de la mine de potasse de Jansen atteignant leur sommet en 2024.

Nous croyons que la décision de la Banque du Canada d’abaisser les taux d’intérêt stimulera les dépenses des ménages et les investissements. Les marchés du logement de la Saskatchewan, tout comme ceux de la province voisine de l’Alberta, figurent parmi les plus vigoureux du pays. L’indice composite des prix des propriétés MLS est en hausse de 6,0 % depuis juillet 2023. Il s’agit d’un écart marqué par rapport à la baisse de 4,2 % enregistrée au niveau national pendant la même période.

MANITOBA – Maintien du cap

Nous nous attendons à ce que la croissance économique du Manitoba cette année soit largement similaire à celle de 2023 (1,2 %). La faiblesse des secteurs des services publics et de l’agriculture s’annonce éprouvante, mais elle sera plus que compensée par une hausse des dépenses en immobilisations et une exploration accrue dans le secteur minier.

L’économie du Manitoba a réservé peu de surprises jusqu’à maintenant cette année. L’activité manufacturière a ralenti (les ventes ont diminué de 0,5 % depuis le début de l’année), car les marchés national et international se montrent hésitants.

Le secteur des services publics a également rencontré des difficultés. Le niveau d’eau du lac Winnipeg et le débit critique de la rivière Saskatchewan ont été nettement inférieurs à la normale au cours du premier semestre de l’année, ce qui a mis à l’épreuve les niveaux des réservoirs et nui à la production d’énergie hydraulique. De fait, le secteur des services publics de la province a connu un départ incroyablement lent. La production d’électricité depuis le début de l’année (de janvier à mai) est la plus faible en plus de dix ans.

Même si ces facteurs freineront vraisemblablement la croissance globale de la province, nous croyons que la bonne tenue d’autres secteurs suffira pour que l’économie bien diversifiée du Manitoba conserve un rythme de croissance légèrement supérieur à la moyenne nationale cette année.

Les dépenses en immobilisations ont été un point fort notable en 2023 et au premier semestre de 2024. La province a alloué 3,1 milliards de dollars supplémentaires pour des mises à niveau et des améliorations de la capacité à Manitoba Hydro, ainsi que pour les soins de santé et le réseau routier.

Les prix des minerais ont aussi connu une légère hausse, notamment ceux du nickel et du lithium. Ce renchérissement attire davantage d’activités d’exploration, dont deux forages près de la mine Tanco. Nous prévoyons que les prix des minerais continueront de grimper, alors que l’excédent sur le marché continue de se rétrécir et que la production intérieure de batteries de véhicules électriques augmente. Cette situation laisse beaucoup de place à la croissance plus tard cette année et en 2025. L’amélioration des corridors d’expédition jusqu’au port de Churchill devrait également être favorable, puisque la demande mondiale continue de se redresser.

ONTARIO – Le ralentissement de l’activité aux États-Unis atténue la croissance

La croissance économique de l’Ontario devrait ralentir plus que dans toute autre province cette année, sous l’effet d’une croissance plus lente aux États-Unis et d’une consommation et d’investissements moroses sur le marché intérieur. Le PIB progressera selon nous de seulement 0,7 % cette année, soit un peu plus que le taux de 0,5 % que nous avions prévu en juin.

Malgré tout, notre prévision de croissance pour l’Ontario en 2024 est inférieure de plus de moitié au taux enregistré en 2023 (1,6 %, selon l’estimation préliminaire de Statistique Canada).

L’excellente fin d’année qu’ont connue les États-Unis en 2023 a protégé l’économie de l’Ontario du ralentissement de la demande intérieure. Toutefois, nous ne croyons pas que la province bénéficiera d’un élan semblable en 2024. Les ventes manufacturières ont baissé pour un troisième trimestre consécutif (données désaisonnalisées sur trois mois), alors que la demande commence à fléchir aux États-Unis et dans d’autres territoires canadiens, minant les perspectives des produits fabriqués en Ontario.

Les dépenses des ménages ontariens n’ont pas non plus beaucoup progressé. Les taux d’intérêt élevés continuent de dissuader les entreprises et les consommateurs de réaliser d’importants achats ou investissements, ce qui a une incidence négative sur le marché du travail de la province. Depuis le début de l’année, les mises à pied ont bondi de façon nettement plus marquée en Ontario (+24 %) que dans toute autre province.

La croissance de l’emploi a également diminué de près de moitié jusqu’à maintenant cette année par rapport à la même période en 2023, dans un contexte de ralentissement de l’activité économique.

En outre, avec l’entrée en vigueur plus tard cette année de nouveaux plafonds pour les demandes de permis d’études et de cibles pour les travailleurs étrangers temporaires, la province ne pourra pas compter sur le même dynamisme insufflé par les nouveaux arrivants à la demande au cours de l’année à venir.

L’affaiblissement survenant plus tard en 2024 nous a incités à réduire notre prévision pour 2025, qui passe de 1,9 % à 1,6 % également. Néanmoins, à notre avis, les perspectives s’amélioreront après l’année en cours. Dans le cadre de la transition vers la carboneutralité, le secteur de l’automobile de l’Ontario a attiré d’importants investissements visant la mise en place d’installations de fabrication de batteries de véhicules électriques. Parallèlement à la baisse des taux d’intérêt, nous prévoyons que cette évolution favorisera une solide reprise en 2025.

Québec – En voie de reprise

Le regain de vigueur, provenant à la fois de sources extérieures et intérieures, met l’économie québécoise sur une trajectoire (légèrement) plus forte après qu’elle est tombée dans une impasse l’année dernière. Les secteurs axés sur l’exportation, tels que l’aérospatiale, les métaux et le matériel de transport, enregistrent une hausse de leurs ventes à l’étranger cette année. De plus, l’activité de construction, en particulier dans le secteur résidentiel, est en train de reprendre. Nous sommes convaincus que ces facteurs, ainsi que les baisses de taux d’intérêt et les dépenses en immobilisations record prévues, permettront à la croissance d’atteindre 1,1 % en 2024, contre un maigre 0,2 % en 2023.

La stagnation de l’année dernière s’explique en partie par des événements défavorables ponctuels. Au printemps, des feux de forêt historiques ont considérablement perturbé la production dans le secteur des ressources. Le temps chaud et sec a également entraîné une diminution du niveau des réservoirs d’eau, ce qui a provoqué une forte baisse de la production hydroélectrique. Par ailleurs, une grève générale des enseignants des écoles publiques a freiné l’activité au cours des derniers mois de 2023.

La plupart de ces événements sont passés. La construction d’habitations, qui est tombée à son niveau le plus bas en huit ans en 2023, se redresse maintenant. Les mises en chantier ont bondi de 35 % au premier semestre de cette année et la production de bois d’œuvre a grimpé de 14 %.

Malgré une économie mondiale vacillante, la demande extérieure pour les principaux produits fabriqués au Québec est en croissance. La hausse des exportations d’aéronefs et de pièces connexes (+12 % en données corrigées des prix), de camions (+49 %) et d’aluminium (+1 %) a alimenté une activité soutenue dans plusieurs secteurs manufacturiers jusqu’à présent cette année.

Même s’ils restent très soucieux de leur budget, les consommateurs québécois sont de plus en plus nombreux à revenir chez les concessionnaires automobiles. Les ventes de véhicules neufs ont augmenté de 15 % d’une année sur l’autre au premier semestre. Selon nous, de nouvelles réductions des taux d’intérêt devraient renforcer la confiance des consommateurs et stimuler les dépenses pour un plus grand éventail d’articles. Elles favoriseront également une reprise graduelle du marché immobilier qui a commencé l’année dernière.

À notre avis, les intentions de dépenses en immobilisations record cette année (en hausse de 8,8 % comparativement à 2023) devraient contribuer davantage d’ici la fin de l’année. L’accélération des grands projets d’investissement (notamment dans l’industrie des batteries pour VE et le secteur de l’énergie verte) aidera l’économie provinciale à maintenir son élan.

NOUVEAU-BRUNSWICK – Les quotas de pêche et un secteur manufacturier morose freineront la croissance

On prévoit que le ralentissement de la demande extérieure de produits fabriqués dans la province bridera la croissance cette année au Nouveau-Brunswick. Par contre, la vitalité du secteur des ménages devrait assurer une progression de 1,1 %, ce qui est comparable à la moyenne nationale.

Le secteur manufacturier de la province pose problème depuis quelques trimestres. La variation d’une année sur l’autre des ventes manufacturières est maintenant en baisse depuis six trimestres consécutifs. Et avec l’affaiblissement accru qui se dessine en Ontario et aux États-Unis, nous ne croyons pas qu’une reprise robuste s’amorcera au cours du second semestre.

Le secteur provincial de la pêche connaît également des difficultés. Les prix des produits de la mer préparés et emballés ont diminué, ce qui a pesé sur les revenus du secteur.

Qui plus est, le ministère des Pêches et des Océans a également abaissé les quotas de pêche dans la baie de Fundy cette saison, réduisant de plus de 30 %, à 16 000 tonnes, les captures autorisées de hareng. Le hareng a été l’un des principaux produits d’exportation de la province en 2022, derrière le homard et le crabe et à égalité avec le saumon.

Le secteur des ménages demeure l’un des piliers les plus robustes du Nouveau-Brunswick, étant soutenu par un niveau d’endettement peu élevé et l’essor démographique. Mais là encore, ces facteurs sont peu susceptibles d’avoir les mêmes effets bénéfiques que ces dernières années.
La croissance de la population a vraisemblablement atteint un sommet l’an dernier. Elle s’est stabilisée depuis, alors que de nouvelles cibles pour les étudiants étrangers et les travailleurs étrangers temporaires entrent en vigueur, et que la poussière retombe après les mouvements migratoires post-pandémiques.

NOUVELLE-ÉCOSSE – Un redressement parmi les plus rapides

L’économie de la Nouvelle-Écosse connaît un redressement parmi les plus rapides. Même si l’essor démographique s’atténue, le rythme d’accroissement de la population demeure élevé d’un point de vue historique, ce qui soutient la demande de biens et de services. Nous nous attendons à ce que la croissance en Nouvelle-Écosse reste supérieure à la moyenne nationale, s’établissant à 1,6 % cette année.

Étant donné l’ascension d’Halifax dans le classement des municipalités (selon la croissance démographique) et les attentes de nouvelles baisses de taux dans les prochains mois, la Nouvelle-Écosse est devenue un pôle de développement. Les signes de reprise dans les marchés du logement locaux ont entraîné le lancement d’un plus grand nombre de projets immobiliers cette année. L’expansion de la construction résidentielle, qui est quatre fois plus élevée que la moyenne nationale jusqu’à présent en 2024, devrait plus que compenser le déclin enregistré en 2023, puisque les mises en chantier remontent.

Les investissements ont aussi été nombreux dans le secteur non résidentiel. Les autorités provinciales de réglementation ont récemment donné le feu vert à Nova Scotia Power pour son projet de batteries de 354 millions de dollars, l’objectif étant d’assurer la stabilité du réseau électrique de la province dans la foulée de la transition vers la carboneutralité. Ce projet, combiné à des dépenses d’investissement supplémentaires de 1,6 milliard de dollars de la province, devrait stimuler le secteur de la Nouvelle-Écosse après le ralentissement de l’an dernier.

Cependant, tout n’est pas rose partout. Le secteur provincial de la pêche fait face à des turbulences, en raison de la baisse des prix des produits de la mer préparés et emballés et du resserrement des quotas de pêche. La vigueur d’autres segments de l’économie devrait toutefois compenser cette saison plus difficile pour le secteur de la pêche de la Nouvelle-Écosse.

ÎLE PRINCE-ÉDOUARD – Poursuite d’une forte croissance

L’Île-du-Prince-Édouard est la seule province canadienne à avoir connu une croissance économique de plus de 2,0 % chaque année depuis 2021. Nous nous attendons à ce que cette tendance se poursuive en 2024, avec un taux de 2,1 %, malgré un ralentissement de la croissance démographique par rapport à des niveaux exceptionnellement élevés.

L’Île-du-Prince-Édouard continue de bénéficier d’une bonne situation démographique, qui accroît la disponibilité de la main-d’œuvre et stimule la demande de biens et de services. La croissance de l’emploi d’une année sur l’autre a maintenant dépassé celle de toutes les autres provinces pour un cinquième trimestre consécutif.

Et bien que l’expansion démographique ait ralenti au cours des derniers trimestres, la population continue de croître à un rythme rapide d’un point de vue historique, ce qui maintient les dépenses globales à la hausse.

Du côté des entreprises, les investissements dans la construction devraient demeurer relativement élevés cette année, soutenus par la construction d’unités d’habitation. Jusqu’à maintenant cette année, les investissements dans la construction résidentielle ont presque doublé par rapport à l’an dernier. La province s’efforce d’agrandir le parc de logements pour répondre à la croissance démographique de l’île.

Une légère augmentation de la superficie ensemencée en pommes de terre et une amélioration des conditions de végétation devraient également donner lieu à un rebond de la production agricole dans la province.

TERRE-NEUVE-ET-LABRADOR – Toujours en voie de redressement grâce au secteur des ménages

Après deux années consécutives de contraction, l’économie de Terre-Neuve-et-Labrador est en voie de se redresser cette année. L’accélération du marché de l’emploi a maintenu le taux de chômage près d’un creux historique, et les dépenses de consommation ont repris.

En dépit toutefois de ces progrès, nous avons revu à la baisse notre prévision de croissance pour 2024, compte tenu des niveaux de production de pétrole plus faibles que prévu et d’un recul des exportations de minerais. Nous prévoyons maintenant une croissance du PIB réel de 1,5 %, soit 0,5 point de pourcentage de moins que nos estimations en juin.

Les conditions étaient réunies l’année dernière pour que la production pétrolière de la province remonte lentement en 2024. Avec le retour prévu du navire SeaRose (utilisé au gisement extracôtier de pétrole et de gaz White Rose) au troisième trimestre, les quatre navires de production pétrolière extracôtiers seront tous en service pour la première fois depuis 2019, à l’exception d’une brève période de deux mois à la fin de l’année dernière.

Malgré cela, toutefois, la production de pétrole dans la province demeure à des niveaux historiquement bas. En fait, depuis le début de l’année, la production a diminué de 5 % par rapport aux six premiers mois de 2023. La remise en service du SeaRose pourrait rapprocher la production des niveaux atteints en 2023, mais il est peu probable qu’elle fasse grimper la croissance du PIB réel à 2,0 %, comme prévu initialement.

La situation s’améliore dans d’autres segments de l’économie, de sorte que la perspective d’une reprise économique cette année est à portée de main.

Étant donné la baisse des taux d’intérêt et l’embellie des perspectives des marchandises qui se dessine à l’horizon, les perspectives d’emploi se sont raffermies, atteignant leur plus haut niveau jamais enregistré au premier trimestre de cette année. L’emploi est resté à des niveaux historiquement élevés dans les mois qui ont suivi, ce qui a maintenu une pression baissière sur le taux de chômage. Celui-ci se situe également à des niveaux records, oscillant autour de 10 %.

Le resserrement des marchés du travail a entraîné une hausse plus rapide des salaires et une reprise des dépenses des ménages à Terre-Neuve-et-Labrador.

La croissance des ventes au détail dans la province est en voie de dépasser la moyenne nationale cette année ; elle s’établit à 4,4 % jusqu’à maintenant cette année. Si les dépenses se poursuivent à ce rythme (comme nous nous y attendons), 2024 sera la première année depuis au moins 2020 où Terre-Neuve-et-Labrador enregistre une croissance des ventes au détail plus rapide que la moyenne canadienne.

Tableaux détaillés des prévisions:

Détail des prévisions économiques
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Tableaux des prévisions provinciales
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À propos des auteurs

Robert Hogue est membre du l’équipe Économique et leadership avisé RBC, se spécialisant dans l’analyse et les prévisions pour le marché de l’habitation canadien et les économies provinciales. Il compte parmi ses publications Tendances immobilières et accessibilité à la propriété, Perspectives provinciales et l’analyse des budgets provinciaux. Dans ses fonctions, il est fréquemment appelé à commenter l’évolution de la conjoncture économique auprès de la direction de RBC, de ses clients et des médias.

Nathan Janzen travaille à RBC depuis 2008, où il s’occupe principalement de la couverture des perspectives macroéconomiques du Canada et des États-Unis. Il est titulaire d’une maîtrise en économie de l’Université McMaster et d’un baccalauréat en économie de l’Université de Regina.

Rachel Battaglia est économiste à RBC. Elle est membre du groupe d’Analyse macroéconomique et régionale et fournit des analyses des perspectives macroéconomiques provinciales. Elle est titulaire d’un baccalauréat en économie (avec distinction) de l’Université Western Ontario et d’une maîtrise en sciences de l’Amsterdam School of Economics.

Claire Fan est économiste à RBC. Elle se concentre sur les tendances macroéconomiques et est chargée d’établir des prévisions relatives au PIB, au marché du travail et à l’inflation pour le Canada et les États-Unis, en fonction des principaux indicateurs.

Carrie Freestone est économiste à RBC. Elle produit des analyses sur le marché du travail et est membre du groupe d’Analyse régionale, où elle contribue à l’établissement des perspectives macroéconomiques de la province.

Abbey Xu est économiste à RBC. Elle se concentre sur les modèles macroéconomiques en tant qu’intrants dans le processus de provisionnement prospectaire de la Banque pour les pertes de crédit et les simulations de crise.

Le présent article vise à offrir des renseignements généraux seulement et n’a pas pour objet de fournir des conseils juridiques ou financiers, ni d’autres conseils professionnels. Veuillez consulter un conseiller professionnel en ce qui concerne votre situation particulière. Les renseignements présentés sont réputés être factuels et à jour, mais nous ne garantissons pas leur exactitude et ils ne doivent pas être considérés comme une analyse exhaustive des sujets abordés. Les opinions exprimées reflètent le jugement des auteurs à la date de publication et peuvent changer. La Banque Royale du Canada et ses entités ne font pas la promotion, ni explicitement ni implicitement, des conseils, des avis, des renseignements, des produits ou des services de tiers.