Lorsque Ray Reddy était un directeur de produits à Google, il a appris une bonne astuce de Larry Page : le test de la brosse à dents. Si vous pouvez utiliser un produit deux fois par jour, il pourra changer vos habitudes. Il deviendra un rituel.
M. Reddy a appliqué ce principe à la dernière frontière de la numérisation : le marché local. Son appli de commande mobile à ramasser, Ritual, offre à peu près les seules choses qu’un géant comme Amazon ne peut offrir : un café chaud sur votre trajet pour le travail et un burger déjà prêt lorsque vous arrivez à l’aire de restauration.
« Les files d’attente m’ennuient », a souligné M. Reddy lors de notre séance mensuelle Les innovateurs RBC, sur l’innovation et la technologie.
À titre de PDG de Ritual, il travaille fort pour que les files d’attente deviennent une chose du passé en offrant la possibilité aux clients de passer leur commande à l’avance. Cela laisse plus de temps pour faire autre chose et offre aux restaurateurs une nouvelle façon d’attirer de nouveaux clients.
En cinq ans seulement, Ritual, qui était une plateforme d’essai à Toronto, est devenue une entreprise internationale faisant des affaires au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie. M. Reddy prévoit tripler le nombre de restaurants participants d’ici la fin de 2019.
Ritual vise principalement à réunir les mondes physique et numérique grâce à la rentabilisation de l’expérience locale, en personne. Il y a là largement place à l’innovation.
Les commerces locaux arrivent loin derrière les grandes entreprises qui ont l’argent et le talent pour faire des investissements importants dans l’avenir du numérique. Selon un sondage de la BDC auprès des petites et moyennes entreprises, seulement 19 % d’entre elles ont résolument adopté la technologie et la culture numériques. Plus de la moitié d’entre elles ont un faible niveau de maturité numérique.
M. Reddy s’est penché sur le problème et en a conclu que l’absence de densité est la cause d’échec des tentatives antérieures de numérisation du marché local. Pour les gens, il n’est pas important que vous ayez 500 restaurants participants, c’est une tout autre histoire pour les 15 restaurants participants les plus proches de chez eux.
« Nous avons tiré des leçons des 15 ou 20 sociétés qui se sont lancées avant nous, a déclaré M. Reddy. Nous avons analysé les motifs de leur échec. »
Grâce à une approche quartier par quartier, Ritual a su créé un produit attrayant pour un quartier avant de passer au prochain. Pour les entreprises, Ritual offre une merveilleuse vitrine pour attirer de nouveaux clients et l’accès à des données sur leur clientèle qu’ils n’avaient pas dans le monde analogique.
« Une fois que vous fournissez des données à des gens, ils ont peine à imaginer comment ils pouvaient s’en passer pour gérer leur entreprise », indique M. Reddy.
Lorsque l’entreprise prend de l’expansion, elle doit relever le défi de faire concorder le monde numérique avec le monde physique.
Les petites entreprises font leur entrée sur un marché numérique où les attentes sont élevées. Les clients sont habitués à ce qui se fait de mieux, selon un récent rapport de McKinsey. Ils s’attendent à une expérience client harmonieuse, sans surprise ni retard. Les entreprises ne doivent pas se contenter d’automatiser un processus existant : elles doivent carrément réinventer tout le processus pour offrir une valeur supérieure et réduire le nombre d’étapes requises.
Si un client Ritual arrive à l’aire de restauration et qu’il ne trouve pas sa commande ou qu’elle n’est pas prête, c’est un problème et ça arrive. Les restaurants et les aires de restauration n’ont pas été conçus pour l’utilisateur numérique. M. Reddy les aidera à se réorganiser pour entrer dans une nouvelle ère.
Cela peut vouloir dire de déplacer le guichet de ramassage des commandes à l’avant et au centre, d’ajouter des tablettes pour y disposer les commandes prêtes et de modifier le rôle du personnel pour que les caissiers deviennent des « concierges » dont le rôle est d’aider les clients à trouver leur commande.
L’expansion du mode de commande numérique a une incidence intéressante sur le monde physique. Si 60 % à 70 % des clients découvrent un restaurant grâce à une appli, nul besoin qu’il soit situé sur une artère animée. Il peut déménager là où le loyer est plus abordable. On assiste à une hausse du nombre de commerces de restauration situés en dehors des zones névralgiques des villes et qui sont principalement axés sur la livraison.
La numérisation des villes ne fait que commencer et les enjeux sont grands. Les entreprises numériquement avancées sont plus susceptibles (62 %) d’enregistrer une croissance élevée des ventes, selon un rapport de la BDC sur les petites et les moyennes entreprises.
En 2019, lorsque votre resto de quartier est en concurrence avec Silicon Valley, c’est tout un changement.
John Stackhouse est un auteur à succès et l’un des grands spécialistes en matière d’innovation et de perturbations économiques au Canada. À titre de premier vice-président, Bureau du chef de la direction, il dirige la recherche et exerce un leadership avisé concernant les changements économiques, technologiques et sociaux. Auparavant, il a été rédacteur en chef du Globe and Mail et éditeur du cahier « Report on Business. » Il est agrégé supérieur de l’institut C.D. Howe et de la Munk School of Global Affairs and Public Policy de l’Université de Toronto, en plus de siéger aux conseils d’administration de l’Université Queen’s, de la Fondation Aga Khan Canada et de la Literary Review of Canada. Dans son dernier livre, « Planet Canada: How Our Expats Are Shaping the Future », il aborde la ressource inexploitée que représentent les millions de Canadiens qui ne vivent pas ici, mais qui exercent leur influence depuis l’étranger.
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