• Le plan budgétaire prévoit de nouvelles mesures totalisant 24 milliards de dollars sur six ans.
  • Le gouvernement a annoncé des baisses d’impôt sur le revenu des particuliers entrant immédiatement en vigueur.
  • Le cadre financier implique un déficit de 4 milliards de dollars en 2023-2024, puis un retour à l’équilibre budgétaire dès 2027-2028.
  • La dette de la province devrait diminuer progressivement.
  • Une nouvelle cible de réduction de la dette a été présentée.

La pandémie est peut-être chose du passé, mais le Québec conserve un penchant pour les gros budgets. Le ministre des Finances du Québec, Éric Girard, a présenté hier un plan budgétaire sur six ans qui prévoit de nouvelles mesures totalisant plus de 24 milliards de dollars, en plus des 22 milliards de dollars qui ont été ajoutés dans le cadre du budget de 2022 et des 14 milliards de dollars supplémentaires alloués lors de la mise à jour budgétaire de l’automne dernier. Les baisses d’impôt sur le revenu des particuliers ont particulièrement retenu l’attention. Le gouvernement caquiste, qui a récemment été réélu, continue de mettre en œuvre son ambitieux programme visant à réduire l’écart de richesse entre le Québec et l’Ontario.

Diminution progressive du déficit

Malgré les investissements supplémentaires, le déficit budgétaire devrait poursuivre sa trajectoire descendante. Après avoir été revu à la baisse pour s’établir à 5,0 milliards de dollars en 2022-2023 (après versements dans le Fonds des générations), il diminuera de 1,0 milliard de dollars par année jusqu’au retour à l’équilibre budgétaire en 2027-2028. Pour y parvenir, le gouvernement réduira les versements dans le Fonds des générations de 3,4 milliards de dollars en 2022-2023 à 2,8 milliards de dollars en 2027-2028 (ils s’établiront à 2,4 milliards de dollars en 2023-2024 et en 2024-2025).

Tendance à la baisse du ratio de la dette nette au PIB du Québec

L’endettement de la province semble légèrement plus élevé que lors de la mise à jour budgétaire de l’automne, bien qu’il se dirige toujours dans la bonne direction (c’est-à-dire qu’il poursuit sa tendance à la baisse). Le budget de 2023 introduit une nouvelle cible de réduction de la dette (atteinte d’un ratio de la dette nette au PIB de 30 % d’ici 2037-2038) afin de favoriser les progrès à long terme. Sa dette (nette) représentant l’équivalent de 38,1 % de son PIB (en mars 2022), la Québec se classe au troisième rang des provinces les plus endettées.

Investissements dans les grandes priorités

Après avoir passé trois années à lutter contre la pandémie (et l’inflation), le gouvernement caquiste propose maintenant un plan pour façonner l’avenir de la province. Les nouvelles mesures du budget de 2023 sont axées sur cinq grandes priorités : l’accroissement de la richesse du Québec, l’amélioration du système de santé, le soutien aux Québécois, le développement du potentiel des jeunes et l’environnement.

Diminution du fardeau fiscal des Québécois

L’accroissement de la richesse du Québec est de loin la mesure la plus coûteuse : 12,1 milliards de dollars y seront consacrés sur six ans, dont 2,1 milliards en 2023-2024. Le gouvernement va de l’avant avec sa promesse électorale de réduire immédiatement de 1 % les deux premières tranches d’imposition sur le revenu des particuliers. L’ensemble des 4,6 millions de contribuables de la province bénéficieront de cette mesure qui, à elle seule, privera le gouvernement de 9,2 milliards de dollars en revenus sur six ans (1,7 milliard de dollars en 2023-2024). D’autres initiatives visent à favoriser la prospérité des régions (investissements de 1,4 million de dollars sur six ans), à stimuler la productivité (888 millions de dollars) et à contrer la pénurie de main-d’œuvre (615 millions de dollars).

Les soins de santé demeurent au cœur des priorités

Le budget de 2023 prévoit 5,6 milliards de dollars de plus en investissements dans les soins de santé sur six ans (1,0 milliard de dollars supplémentaires en 2023-2024), principalement dans le but d’améliorer l’efficacité du système et le soutien aux aînés. Diverses initiatives totalisant 3,6 milliards de dollars (740 millions de dollars en 2023-2024) visent à accroître l’accessibilité à la propriété, les réseaux de transport, à promouvoir la culture québécoise et la langue française et à soutenir les familles et les Québécois. Une somme supplémentaire de 2,3 milliards de dollars (345 millions de dollars en 2023-2024) sera allouée à l’éducation et à la formation professionnelle afin de « développer le potentiel des jeunes ». Enfin, les nouveaux investissements liés à l’environnement (y compris à la protection de l’eau et de la biodiversité) s’élèveront à 953 millions de dollars (122 millions de dollars en 2023-2024).

Augmentation des dépenses et baisses d’impôt

En résumé, le budget de 2023 prévoit une augmentation des dépenses et des baisses d’impôt, ce qui se traduira par un déficit plus élevé (4,0 milliards de dollars) en 2023-2024 que celui prévu dans la mise à jour budgétaire de l’automne dernier (2,3 milliards de dollars). Cette différence serait encore plus grande (de 2,1 milliards de dollars) si le gouvernement n’avait pas prévu une réduction de 40 % des versements dans le Fonds des générations (par rapport au budget précédent) et de 0,5 milliard de dollars de la réserve pour éventualités. Ces deux coupes budgétaires témoignent d’un changement de cap pour le gouvernement et permettront de maintenir à la baisse le déficit du Québec jusqu’à l’atteinte de l’équilibre budgétaire en 2027-2028.

Baisses d’impôt : est-ce le bon moment ?

La souplesse fiscale acquise au cours de la dernière décennie au prix de grands sacrifices a permis au gouvernement de la CAQ de multiplier les initiatives pour accroître la richesse des Québécois sans compromettre la situation financière à long terme de la province. Comme les impôts y sont élevés, il va sans dire qu’un allégement fiscal est le bienvenu, notamment parce que la flambée de l’inflation a fait fondre le pouvoir d’achat de bien des ménages. La hausse du salaire net risque d’augmenter la demande de biens et de services et de nuire à la Banque du Canada, qui tente de contenir l’inflation (et qui pourrait donc avoir à relever les taux d’intérêt de façon plus musclée). Peut-être aurait-il été préférable d’annoncer des baisses d’impôt seulement une fois l’inflation revenue à son niveau cible.

Sommaire des opérations budgétaires consolidées
(en milliards de dollars)Bénéfice réelPrévisions
2021-222022-232023-242024-252025-262026-272027-28
Revenus Consolidés138,8145,1147,7151,8157,0162,9167,6
Revenus autonomes109,6115,9118,0122,1126,0130,9134,4
Transferts fédéraux29,229,229,729,730,932,033,2
Dépensesconsolidées136,0146,8147,9151,4155,4159,7163,2
Dépenses de programme127,3136,7138,4141,5145,4149,1152,1
Service de la dette8,610,19,59,910,010,511,1
Réserve pour éventualités(1,5)(1,0)(1,0)(1,5)(1,5)
Surplus/(déficit)2,8(1,7)(1,6)(0,6)0,51,72,8
Versements dans le Fonds des générations(3,6)(3,4)(2,4)(2,4)(2,5)(2,7)(2,8)
Solde budgétaire au sens de la Loi sur léquilibre budgétaire(0,8)(5,0)(4,0)(3,0)(2,0)(1,0)0,0
Solde budgétaire(% du PIB)(0,2)(0,9)(0,7)(0,5)(0,3)(0,2)0,0
Dette nette (% du PIB)38,137,437,737,537,036,535,8

Robert Hogue est membre du l’équipe Économique et leadership avisé RBC, se spécialisant dans l’analyse et les prévisions pour le marché de l’habitation canadien et les économies provinciales. Il compte parmi ses publications Tendances immobilières et accessibilité à la propriété, Perspectives provinciales et l’analyse des budgets provinciaux. Dans ses fonctions, il est fréquemment appelé à commenter l’évolution de la conjoncture économique auprès de la direction de RBC, de ses clients et des médias.

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