En matière d’énergie, le Canada a des choix urgents et difficiles à faire : tout en éliminant nos émissions nettes de GES d’ici 2050, comme l’imposent nos objectifs climatiques, nous devons accroître rapidement nos capacités de production d’électricité – croissance de l’économie oblige. La technologie actuelle ne permet pas de relever le défi en n’utilisant qu’une source d’énergie, mais une chose est claire : l’énergie nucléaire peut jouer un rôle clé dans l’atteinte de la carboneutralité – et la commercialisation de petits réacteurs modulaires (PRM) se révèle de plus en plus prometteuse.
Les PRM sont des versions plus polyvalentes des grands réacteurs d’aujourd’hui et ils pourraient permettre de résoudre bon nombre des problèmes auxquels est confrontée l’industrie nucléaire. Bien que la plupart des PRM en soient toujours à l’étape de la conception, ils laissent entrevoir la possibilité de réduire les coûts de construction et d’exploitation, d’élargir la gamme d’applications au niveau de l’ensemble de l’économie, en plus d’améliorer éventuellement les facteurs de sécurité. S’ils parvenaient à être commercialisés avec succès, les PRM pourraient offrir de nouvelles sources d’électricité non émettrices aux grandes villes et aux communautés éloignées, tout en offrant une mesure de souplesse aux principales industries canadiennes qui se tournent actuellement vers les combustibles fossiles pour alimenter leurs processus de production.
Les retombées des PRM pourraient être considérables, alors qu’on s’attend à ce que le marché mondial des PRM atteigne annuellement les 150 à 300 milliards de dollars d’ici 20401.Au vu des sept décennies de succès qu’a connu le pays dans le domaine de l’énergie nucléaire, le Canada jouit déjà d’une position avantageuse. Les PRM pourraient faciliter la revitalisation de l’industrie nucléaire canadienne, nous permettant ainsi d’exporter nos talents et notre expertise éprouvée à travers le monde, qui s’est engagé à tripler l’apport de l’énergie nucléaire d’ici 20502. Plusieurs pays, au rang desquels figurent les États-Unis et la Grande-Bretagne, ont annoncé d’importants partenariats public-privé pour tirer profit de ces occasions.
Le Canada a déjà pris les devants en déployant une nouvelle génération de PRM. L’un de ces réacteurs – le réacteur GE-Hitachi BWRX-300 – est sur le point d’être construit à la centrale nucléaire de Darlington, située à l’est de Toronto. À lui seul, ce PRM, le premier des quatre qui seront construits à la centrale de Darlington, pourrait à terme alimenter en électricité 300 000 foyers 3. D’autres PRM qui en sont en diverses étapes du processus de délivrance des permis à travers le pays pourraient éventuellement alimenter des installations industrielles et des mines isolées, en plus de remplacer dans les communautés isolées le recours au diesel.
- Types de PRM
Les PRM varient sur le plan de la taille, de la conception et des composants, des puissances électriques et thermiques, ainsi que des applications prévues. Si les premiers PRM serviront à produire de l’électricité pour les villes, la polyvalence de la technologie pourrait faire en sorte que des versions réduites, soit des microréacteurs modulaires, pourraient éventuellement être mises à profit par des industries, de petites communautés non reliées au réseau et des mines. Comme c’est le cas des grands réacteurs nucléaires, les PRM sont généralement classifiés en fonction de leur système de refroidissement et des systèmes de contrôle de leurs réactions de fission.Réacteurs à eau ordinaire et lourde
La technologie la plus établie a recours à de l’eau pour refroidir le cœur du réacteur et ralentir les neutrons, soit les particules subatomiques qui contribuent à favoriser les réactions de fission nucléaire.Réacteurs à haute température à réfrigérant gazeux
Utilise des gaz comme l’hélium pour refroidir le cœur du réacteur et avoir des vitesses de neutrons plus rapides, ce qui permet de produire des températures plus élevées.Réacteurs à sels fondus
Les PRM les plus avancés sur le plan conceptuel ont recours à des matériaux comme des métaux liquides et des sels ou des gaz pour en refroidir le cœur. Le recours à de tels matériaux peut contribuer à produire des températures plus élevées en sortie de réacteur.Réacteurs à neutrons rapides
Comme leur nom l’indique, les réacteurs à neutrons rapides ont recours à des neutrons rapides pour déclencher et entretenir les réactions de fission, ce qui les rend plus économes en carburant et augmente la production d’électricité.
Source: Département de l’Énergie des États-Unis
Pour optimiser le parcours menant à la carboneutralité, le Canada a élaboré un plan national de développement et de commercialisation des PRM. En 2018, Ottawa a mis sur pied une coalition à laquelle participent divers paliers de gouvernement, des communautés autochtones, des universités, des services publics d’électricité et d’autres industries en vue d’élaborer une Feuille de route canadienne pour les petits réacteurs modulaires coordonnée4. Cette feuille de route a été suivie, en 2020, par un Plan d’action canadien des petits réacteurs modulaires (PRM)5. Pour demeurer à l’avant-garde d’une potentielle révolution au chapitre des PRM, le Canada doit chercher d’autres moyens de financer et de réglementer le développement et la commercialisation des réacteurs. Personne ne s’attend à ce que cette opération soit simple. Cependant, le déploiement efficace d’un plan national visant le déploiement de PRM offre à la clé des perspectives d’établissement d’une nouvelle source d’énergie polyvalente pour le pays, en plus d’un puissant catalyseur qui saura appuyer la transition engagée par le Canada en faveur d’une économie plus verte.
Principales conclusions
- Pour parvenir à la carboneutralité d’ici 2050, le Canada devra construire 85 PRM ; il en coûtera entre 102 et 226 milliards de dollars.
- En dehors de la production d’électricité aux fins des réseaux de transport et de distribution, les PRM pourraient, grâce à leur petite taille et à leur souplesse d’utilisation, remplacer les équipements à combustibles fossiles qui répondent actuellement aux besoins de certains procédés industriels.
- Pour assurer la croissance du secteur des PRM, le Canada aura besoin en moyenne, entre 2025 et 2040, de plus de 5 000 personnes qualifiées travaillant à temps plein.
- Les partenariats et l’expertise autochtones joueront un rôle vital dans le développement du secteur et des chaînes d’approvisionnement connexes, qu’il s’agisse de l’extraction de l’uranium, de la fabrication des composantes indispensables ou du lancement de nouveaux projets à l’intérieur ou au voisinage des territoires traditionnels des Premières Nations.
- Ne disposant pas d’installations d’enrichissement de l’uranium, le Canada devra s’entendre avec ses alliés (les États-Unis et la France, notamment) pour s’assurer les approvisionnements stables que nécessitera son parc de PRM.
Qu’est-ce qu’un PRM ?
L’énergie nucléaire participe à la production d’électricité sans émissions de carbone depuis les années 50, offrant en cela une mesure de stabilité et de diversité aux réseaux électriques nationaux. Outre les grandes centrales, de petits réacteurs nucléaires sur mesure assurent la propulsion de sous-marins, de porte-avions et d’engins spatiaux planétaires. Certains petits réacteurs ont été installés discrètement à des fins de recherche dans des laboratoires nationaux ou des campus universitaires, comme c’est le cas à l’Université McMaster de Hamilton6 et au Collège militaire royal du Canada à Kingston 7.
Tous les PRM ne satisfont pas au critère des 300 MW. Du reste, tous les réacteurs de moins de 300 MW ne sont pas des PRM. Ainsi, par exemple, des entreprises britanniques développent des PRM d’une puissance de 470 MW9 tandis que, parmi le parc de réacteurs nucléaires indien figurent plusieurs réacteurs de 220 MW dont on ne considère pas pour autant qu’ils soient des PRM10.
Le changement climatique a renouvelé l’intérêt voué à l’industrie nucléaire, et notamment aux PRM. Bien qu’à travers le monde on dénombre quelque 98 modèles de PRM qui en sont à divers stades de développement, seules la Russie et la Chine exploitent actuellement des PRM à des fins commerciales. La majorité des PRM en sont toujours à l’étape de la conception. C’est aux États-Unis que l’on retrouve le plus grand nombre de projets de développement de PRM, ce pays étant suivi de la Russie, de la Chine, du Japon et du Canada. Le Danemark, qui ne dispose en soi d’aucune forme d’énergie nucléaire, s’intéresse également à cette technologie avec un système de PRM flottant11.
Des modèles de PRM sont créés dans des pays du monde entier
Modèles de PRM en développement (nombre de projets)
Source : World Nuclear Association, Institut d’action climatique RBC
Bien qu’une poignée d’acteurs privés s’emploient à commercialiser des PRM, le soutien gouvernemental est essentiel pour que la technologie puisse se développer. Aux États-Unis, le ministère de l’Énergie et des entreprises privées ont conjointement investi plus de 1 milliard de dollars dans le développement des PRM12. The Tennessee Valley Authority (TVA), the largest U.S. public utility, has thrown its weight behind SMR technology. As early as 2019, it obtained federal approval for SMRs at its Clinch River Nuclear site13. In November 2020, Britain announced a £215 million spending package to be matched by private investment14.
En 2022, le Canada a annoncé qu’il consentirait une somme de 29,6 millions de dollars à des cadres de recherche et de chaîne d’approvisionnement, 70 millions de dollars à la recherche portant sur la réduction des déchets issus des PRM et 51 millions de dollars à la Commission canadienne de sûreté nucléaire afin qu’elle puisse renforcer la capacité en matière de réglementation des PRM1516. Cette même année, la Banque de l’infrastructure du Canada consentait un financement de 970 millions de dollars au PRM de la centrale de Darlington17. Pour sa part, le Nouveau-Brunswick a investi 10 millions de dollars en 2018 afin de créer un pôle de recherche portant sur les PRM18, une autre somme de 80 millions de dollars au total étant consentie à deux entreprises de pointe dans le domaine des PRM19. Enfin, la Saskatchewan a investi 80 millions de dollars en 2023 dans un projet de microréacteur modulaire20.
Pour demeurer à l’avant-plan de la révolution potentielle associée aux PRM, le Canada doit continuer d’améliorer la façon dont il finance et réglemente le développement et la commercialisation des réacteurs.
Un moment stratégique pour le Canada
Les PRM pourraient occuper une place importante dans le bouquet des solutions énergétiques futures du Canada. La taille de cette place est fonction de la mesure dans laquelle les PRM peuvent être développés et déployés rapidement. Au vu des perspectives technologiques actuelles, les PRM jouissent de plusieurs avantages par rapport aux autres grandes sources d’énergie.
Les projets hydroélectriques ont toujours constitué un élément fondamental du paysage énergétique canadien. Cependant, il n’est pas possible ou viable, dans de nombreuses régions du pays, de réaliser de grands projets. En effet, leur budget élevé, leur impact sur les terres et l’absence de nouvelles ressources de qualité font en sorte qu’il est désormais difficile d’envisager la construction de nouveaux barrages. Du reste, des sécheresses prolongées pourraient venir remettre en question leur fiabilité.
Par rapport aux options nucléaires, les énergies renouvelables, comme l’énergie éolienne et solaire, offrent une source d’électricité relativement peu couteuse. Cependant, cette forme d’énergie présente un caractère intermittent, sa disponibilité variant selon le moment où brille le soleil et où souffle le vent, ce qui signifie que les sources d’énergie renouvelables doivent pouvoir en général être appuyées par d’onéreuses batteries ou par des systèmes alimentés au gaz naturel à forte intensité d’émissions.
Les centrales au gaz naturel modernisées ou intégrant des systèmes de capture et stockage de carbone pourraient fournir une énergie relativement propre et fiable. Cependant, sur la voie menant à la carboneutralité, elles se limiteront en grande partie aux zones géographiques où les émissions peuvent être capturées et stockées sous terre (principalement dans l’ouest du Canada), en vertu d’un procédé qui est fréquemment assorti d’un prix élevé et d’incertitudes en termes d’économie et de potentiel de commercialisation.
Pour atteindre son plein potentiel, l’énergie nucléaire doit surmonter des antécédents marqués au sceau de dépassements de coût, de longs délais de réalisation et de faibles niveaux d’acceptation sociale dans certaines régions du pays, comme en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse. Subsistent également des préoccupations en matière de sécurité nucléaire et de gestion des déchets. Si le nucléaire constitue la deuxième source mondiale d’énergie à émission zéro après les barrages hydroélectriques, sa part de la production mondiale d’électricité est passée de 17 % dans les années 90 à 9 % aujourd’hui (le gaz naturel, le charbon et les énergies renouvelables venant combler l’écart)21.
Les PRM sont appelés à progresser au point de représenter en 2050 la quatrième capacité installée la plus importante
Puissance installée, MW
Source: Canada Energy Regulator, RBC Institut d’action climatique
S’ils devaient être commercialisés, les PRM pourraient permettre de comprimer les échéanciers de réalisation des projets nucléaires, réduire les coûts et permettre d’implanter le nucléaire dans des zones géographiques dont les réseaux sont trop petits pour accueillir de grandes centrales électriques. Dans le cadre d’un scénario de carboneutralité proposé par la Régie de l’énergie du Canada, le pays aura besoin de 25 gigawatts (GW) de capacité provenant des PRM, soit l’équivalent d’environ 85 PRM aptes à contribuer au réseau d’ici 2050, lesquels pourraient fournir 7 % de la capacité électrique du Canada. En vertu d’un tel scénario, l’énergie éolienne côtière représenterait 30 % du total, l’hydroélectricité, 26 %, l’énergie solaire à grande échelle, 10 %, le gaz naturel à faibles émissions, 7 %, et les grandes centrales nucléaires, 30 %22. En tirant parti des PRM comme source d’énergie non émettrice, le Canada pourrait économiser en moyenne 41 mégatonnes (Mt) d’émissions annuellement entre 2030 et 2050 par rapport à une source de production au gaz naturel non altéré23.
Applications des PRM
L’approvisionnement en électricité du Canada est l’un des plus écologiques au monde, alors que 81 % de la capacité provient de l’hydroélectricité, du nucléaire, de l’énergie éolienne et de l’énergie solaire24. Cependant, il n’existe aucune solution simple qui permettrait de décarboner les 19 % du réseau canadien qui toujours tributaires des combustibles fossiles.
Réduire les 75 Mt d’équivalent CO2 émises annuellement par le secteur industriel canadien26 constitue un impératif zéro émission nette. Les PRM peuvent aider les industries canadiennes à se décarboner en fournissant aux producteurs de matières premières une source d’électricité et de chaleur ininterrompue et carboneutre. À plus long terme, les PRM pourraient servir à produire des carburants synthétiques et de l’hydrogène à faibles émissions qui pourraient s’avérer utiles dans les secteurs de l’acier, du ciment et de la pétrochimie à forte intensité de carbone.
Cependant, le déploiement de PRM sera périlleux dans le cas de certains procédés industriels, au vu des technologies existantes. À titre d’exemple, la fabrication de l’acier dans les hauts-fourneaux de même que celle du ciment nécessitent des températures égales ou supérieures à 1000 °C, que les approches conceptuelles actuelles en matière de PRM ne permettent pas d’envisager27.
Le secteur minier produit 2 % des émissions nationales28, mais a accompli de constants progrès en matière de décarbonation. À titre d’exemple, les entreprises minières du secteur du nickel ont entrepris de convertir leurs parcs de véhicules miniers à l’électrique29/sup> et ont engagé des projets qui tirent parti des résidus pour capter le CO230/sup>.
Cependant, le niveau de complexité varie et certaines mines seront plus difficiles à décarboner. Les plus grandes mines et celles qui présentent les niveaux d’émissions les plus élevés du Canada sont vouées à l’exploitation massive de minerai de fer à Terre-Neuve-et-Labrador, au Québec et au Nunavut. À court terme, ces activités continueront d’être tributaires des combustibles fossiles car il n’existe actuellement aucune solution de rechange apte à produire les températures élevées (au moins 1300 °C) dont elles ont besoin pour assurer le traitement du minerai31.
La décarbonation de ce secteur à forte intensité de carbone présente sans doute le plus grand défi climatique du Canada. L’extraction in situ des sables bitumineux représente 12 % des émissions nationales32 et consomme 30 % de la production de gaz naturel du Canada33 qui est brûlé dans des chaudières pour produire la vapeur nécessaire aux techniques de production in situ.
Perspectives d’avenir :
Ce dont a besoin le Canada pour faire des PRM une réalité
La construction des grandes centrales nucléaires donne traditionnellement lieu à des dépassements de coûts. Depuis les années 70, les coûts d’investissement des grandes centrales nucléaires aux États-Unis, en France, au Canada et en Allemagne ont grimpé de 60 % à 200 %35, et certains projets récents ont dépassé les budgets prévus de l’ordre de plusieurs milliards de dollars36.
Les PRM pourraient éventuellement contribuer à inverser cette tendance, à tout le moins en théorie. En effet, leur conception moins complexe, leurs caractéristiques de sécurité plus enviables pouvant permettre de rationaliser la réglementation et une possible approche privilégiant la fabrication modulaire et l’assemblage sur place constituent des aspects qui, au dire des défenseurs des PRM, pourraient permettre de surmonter les problèmes de coût auxquels est confrontée l’industrie. Si les PRM peuvent être construits dans les délais et selon ce que prévoient les budgets, ils pourraient s’avérer compétitifs en termes de coût avec d’autres sources d’énergie à émissions faibles ou nulles.
Comme il est encore trop tôt pour tirer le bilan des PRM, il est difficile pour les marchés des capitaux d’évaluer la situation. Ne fonctionnent actuellement commercialement que deux PRM : l’un en Russie, et l’autre en Chine. Dans les deux cas ont été observés une hausse des coûts et des retards sur le plan de l’échéancier de réalisation des projets37. La construction d’un PRM a débuté en Argentine en 2014. Alors qu’une petite poignée de projets en sont à une étape de développement avancée à travers le monde, on ne peut encore déterminer si les PRM parviendront à réaliser des économies d’échelle et à réduire leurs coûts à court terme.
La construction des 85 PRM dont a besoin le Canada pour atteindre ses objectifs climatiques de carboneutralité devrait coûter entre 102 et 226 milliards de dollars38. Compte tenu des longs délais en amont propres au nucléaire, ces dépenses devront être engagées sous peu. Selon l’un des scénarios prospectifs de carboneutralité, le secteur canadien de l’électricité aurait besoin que 93 % de la capacité associée aux PRM du pays soit mise en œuvre d’ici 204039. Les dépenses en capital nécessaires pour appuyer une croissance d’une telle rapidité au cours des années 2030 devront atteindre en moyenne 9 à 20 milliards de dollars par an40.
Le Canada jouit déjà d’un avantage. En effet, le crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres fédéral pourrait permettre de compenser 30 % des coûts en capital des PRM. Selon les projections actuelles, ces crédits permettraient de réduire le coût de l’électricité produite par les PRM de 24 % tout en renforçant leur niveau de compétitivité41.
En construisant un nouveau parc de PRM pour produire de l’énergie propre, le Canada peut planifier la plus récente phase de sa transition énergétique de concert avec les communautés autochtones, et ce, à toutes les étapes de la chaîne de valeur des PRM, de l’uranium jusqu’au développement et à l’exploitation des projets, voire éventuellement à la gestion des combustibles épuisés.
Les signes avant-coureurs sont encourageants. Les groupes autochtones s’affairent déjà à chercher des occasions liées au développement des PRM au Canada, et le financement gouvernemental a contribué à la création d’organismes comme le conseil consultatif autochtone afin que les communautés autochtones puissent s’exprimer d’une voix nationale unie sur les PRM42. Au Nouveau-Brunswick, le Conseil des Micmacs du district de la Rive nord et ses sept Premières Nations constituantes ont signé l’an dernier des ententes de participation avec les sociétés Moltex Energy Canada et ARC Clean Technology Canada en vue du développement et du déploiement d’une technologie de PRM avancée43. En Saskatchewan, trois entreprises appartenant à des Autochtones ont uni leurs forces en 2021 afin d’investir et de créer conjointement des entreprises appelées à desservir les marchés des PRM44.
La création d’un secteur national prospère en matière de PRM pourrait créer d’intéressantes possibilités d’exportation pour une nouvelle génération de nucléaire canadien. Parmi les principaux domaines envisageables figure la concession de licences pour les réacteurs GE Hitachi BWRX 300, dont la construction est prévue à la centrale nucléaire de Darlington. La société d’État provinciale Ontario Power Generation (OPG), le service public d’électricité qu’est la Tennessee Valley Authority et la société polonaise Synthos Green Energy ont investi 400 millions de dollars pour mener à bien la conception du BWRX 30045. Si cette approche conceptuelle devait porter fruit et se développer, l’OPG pourrait partager les recettes tirées des licences technologiques issues de futurs projets de construction de BWRX 300.
L’expertise canadienne en matière de gestion de projets sera également convoitée. D’ici 2040, l’émergence d’un secteur PRM prospère pourrait créer des avenues d’une valeur annuelle comprise entre 3 et 10 milliards de dollars pour l’expertise canadienne dans le domaine de la préconstruction (p. ex. acquisition de terrains, études environnementales, délivrance de permis) et des services indirects (p. ex. ingénierie, gestion de projets, assurance de la qualité, essais et mise en service).46.
Les possibilités en matière d’exportation pourraient s’étendre à d’autres volets de l’industrie des PRM, comme dans le cas de l’approvisionnement en uranium et de la conversion de ce minerai. Le Canada est le deuxième producteur d’uranium au monde, après le Kazakhstan, alors que le pays produit 15 % de l’approvisionnement mondial d’uranium47. La multiplication par trois de la capacité nucléaire mondiale d’ici 2050, telle que prévue lors de la conférence de Dubaï sur les changements climatiques (COP28) des Nations Unies, entraînerait la création de perspectives intéressantes pour l’industrie minière canadienne de l’uranium.
La conversion de l’uranium, soit les processus qui permettent de transformer le minerai d’uranium en carburant ou en produits prêts à l’enrichissement, constitue une autre avenue possible. Le Canada contrôle 28 % de la capacité opérationnelle en matière de conversion de l’uranium du monde, proportion qui, si elle est inférieure à celle de la Russie (38 %), se situe néanmoins devant celles de la Chine (25 %) et de la France (8 %)48.
Pour simplifier la mise en place des PRM, le secteur privé et les gouvernements fédéral et provinciaux devront surmonter les perceptions négatives que suscite l’énergie nucléaire. Ils seront également confrontés aux restrictions gouvernementales en place dans certaines provinces. La Colombie-Britannique interdit depuis longtemps la production d’énergie nucléaire49 tandis que la Nouvelle-Écosse n’a que récemment reconsidéré la possibilité de produire de l’énergie nucléaire dans la province50.
Les sondages montrent que les attitudes de la société canadienne à l’égard de l’énergie nucléaire sont en train de changer. Entre 2012 et 2023, l’appui manifesté par la population canadienne à l’égard de l’énergie nucléaire est passé de 37 % à 55 %, alors que 62 % des personnes interrogées considèrent désormais que l’énergie nucléaire est essentielle à la stratégie carboneutre du Canada. Une majorité de la population de l’Ontario, de la Saskatchewan et de l’Alberta appuie l’énergie nucléaire, comme c’est le cas de vastes pans de la population vivant au Manitoba et dans les provinces de l’Atlantique.
Les sondages d’opinion publique montrent que les Canadiens susceptibles de s’opposer à un projet nucléaire jugé bénéfique s’il devait être construit à proximité de leur lieu de résidence sont de plus en plus minoritaires. Les sondages qui tentent de cerner les inquiétudes de la population à l’égard de la sélection de sites voués à l’implantation de nouvelles centrales et d’installations de gestion des déchets nucléaires montrent que l’opposition locale à de nouveaux projets – notamment à des projets nucléaires – a culminé en 2011, ces préoccupations ayant reculé depuis cette date.
D’autres défis demeurent. En effet, en 2022, 60 % des Canadiens indiquaient qu’ils n’avaient jamais entendu parler des PRM, tandis qu’un autre groupe de 25 % de Canadiens affirmaient n’en être que vaguement conscients. Les sceptiques n’étaient pas convaincus de l’information portant sur l’empreinte réduite, le caractère abordable en termes de prix et la sécurité rehaussée des PRM, bien qu’ils fussent néanmoins disposés à en apprendre plus à leur sujet51.
Le Canada aura besoin d’une revitalisation rapide de sa main-d’œuvre nucléaire pour appuyer la croissance de l’industrie des PRM au cours des prochaines décennies. Au moins le tiers des professionnels du nucléaire du pays approchaient en 2019 l’âge de la retraite. Il sera essentiel que le pays puisse compter sur les compétences nucléaires essentielles alors que quelque 4 000 professionnels, tous métiers confondus, s’apprêtent à prendre leur retraite d’ici 2025.
Besoins en matière de main-d’œuvre pour le parc de PRM prévu à court terme
Nombre de travailleurs
Source: Conference Board of Canada, NB Power, Source : Institut d’action climatique RBC
La construction et l’exploitation du parc de PRM prévu à court terme en Ontario, en Saskatchewan et au Nouveau-Brunswick, de même qu’en Alberta, nécessiteront en moyenne que l’on puisse compter sur 5 300 travailleurs annuellement d’ici 2040, environ 2 400 travailleurs étant appelés à assurer l’exploitation et l’entretien du parc par la suite. Pour répondre à la demande nationale et internationale, des secteurs connexes comme celui de l’extraction et du traitement de l’uranium devront également compter sur une main-d’œuvre plus importante.
Parce que son parc de réacteurs CANDU fonctionne à l’uranium naturel, et qu’un traité international empêche le pays d’enrichir de l’uranium sur son territoire, le Canada n’a pas développé de capacité nationale en matière d’enrichissement de l’uranium53. Le Canada devra donc se tourner hors de ses frontières pour trouver l’uranium enrichi nécessaire pour le bon fonctionnement d’un futur parc nucléaire qui aura presque certainement besoin d’un tel combustible. La quantité d’uranium nécessaire dépendra des modèles qui seront développés, tant en ce qui concerne les PRM que les grandes centrales nucléaires.
À une exception près, tous les systèmes de PRM commercialisés aujourd’hui au Canada ont besoin d’uranium enrichi à différents degrés. Les premiers PRM canadiens seront alimentés par de l’uranium faiblement enrichi, lequel proviendra dans un premier temps de la France et des États-Unis54. Des systèmes plus avancés nécessiteront de l’uranium faiblement enrichi à teneur élevée.
Les activités d’enrichissement de l’uranium sont concentrées sur le plan géographique. En date de 2022, la Russie contrôlait 40 % de la capacité mondiale en matière d’enrichissement55 et était le seul producteur commercial d’uranium faiblement enrichi à teneur élevée. Les enjeux liés à l’accès à l’uranium faiblement enrichi à teneur élevée ont déjà perturbé des projets de PRM aux États-Unis. La résurgence du nucléaire se heurte à une capacité stagnante en matière d’enrichissement, après des années d’offre excédentaire et de sous-investissement, alors qu’il se pourrait fort bien que l’uranium enrichi soit éventuellement confronté à un goulot d’étranglement. Parvenir à résoudre ce problème de goulot d’étranglement pourrait devenir critique.
Au Canada, le combustible nucléaire irradié provient actuellement du parc de réacteurs CANDU. Il est géré en toute sécurité depuis que les premiers réacteurs commerciaux ont commencé à fonctionner il y a environ cinq décennies. À mesure que le Canada commercialisera des PRM, de nouveaux types de combustibles nucléaires usés nécessiteront une gestion à long terme. Les propriétés physiques, les quantités et les protocoles de gestion des combustibles irradiés varieront considérablement selon le type de PRM en cause. Dans certains cas, le combustible irradié sera d’un type bien compris pour lequel existent déjà à l’échelle internationale des protocoles de gestion. Pour d’autres, il conviendra d’élaborer de nouveaux protocoles de gestion des déchets.
Les PRM pourraient contribuer à décarboner et à étendre les réseaux électriques qui desservent les grandes et petites agglomérations tout en fournissant de l’énergie aux marchés industriels en tête de pont. Cependant, à mesure qu’augmente la demande d’électricité, les grandes centrales nucléaires traditionnelles doivent continuer à jouer un rôle. Les technologies nucléaires conventionnelles éprouvées, comme le réacteur CANDU proprement canadien et les technologies de rechange éventuelles provenant de l’étranger, sont avantageusement placées pour fournir une capacité sans émissions complémentaires.
À l’exception du réacteur Point Lepreau au Nouveau-Brunswick, le parc nucléaire du Canada est concentré en Ontario. La remise à neuf réussie de deux unités de la centrale nucléaire de Darlington ayant pris près de six mois d’avance sur l’échéancier prévu, et compte tenu des engagements en matière de remise à neuf supplémentaires touchant la centrale nucléaire de Pickering, le Canada est prêt à maintenir son parc en activité pendant au moins 30 autres années56. Cependant, il sera essentiel de traduire cette expérience en une nouvelle capacité nucléaire pour que le Canada puisse atteindre ses objectifs climatiques tout en maintenant un approvisionnement énergétique sûr.
Se préparer à la venue des petits réacteurs
Le Canada est un leader mondial dans l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire depuis plus de 75 ans. Les premières recherches menées dans les laboratoires de Montréal et de Chalk River ont contribué aux percées qui ont été réalisées dans l’industrie ainsi qu’au développement d’une technologie sûre et polyvalente du réacteur CANDU – utilisée dans l’est du Canada et exportée dans six autres pays. Les centrales nucléaires de Pickering, Bruce et Darlington ont joué un rôle stratégique tout au long des années 90, en alimentant d’importantes chaînes d’approvisionnement en Ontario et en employant des dizaines de milliers de travailleurs qualifiés. Bien que le resserrement budgétaire et les craintes mondiales concernant la sécurité nucléaires aient interrompu la croissance de l’industrie dans les années 80 et 90, la décision de réinvestir dans les centrales de Bruce et Darlington a depuis lors insufflé une nouvelle vie à ce secteur.
Les promesses associées aux PRM présentent désormais au Canada de nouveaux choix en ce qui concerne notre avenir nucléaire. Si les PRM peuvent être développés et commercialisés rapidement et de manière rentable, ils pourront aider le Canada à répondre à la demande croissante d’électricité et à respecter son engagement d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Cependant, nous devrons agir plus rapidement : pour que le Canada atteigne la carboneutralité d’ici 2050, 93 % de la capacité des PRM devra être mise en service dans les années 2030, soit à un rythme deux fois plus rapide que celui que le Canada est parvenu à atteindre en marge du développement de sa capacité nucléaire conventionnelle entre les années 70 et 9057.
La bonne nouvelle tient au fait que le Canada prend les devants dans le déploiement des PRM. Le prototype GE Hitachi BWRX 300 est en voie de construction à la centrale de Darlington tandis que d’autres PRM en sont à diverses étapes d’obtention des permis. Le succès pourrait permettre de débloquer une nouvelle source d’énergie pour combler les besoins en matière d’énergie de base non émettrice pour les réseaux du pays ainsi que pour l’énergie hors réseau dans le cas des endroits éloignés. Le succès permettra également de positionner le Canada à titre d’exportateur important de composants et d’expertise en matière de PRM.
Le Canada devra faire preuve d’agilité. L’énergie nucléaire est indiscutablement notre source d’électricité la plus complexe. Et la commercialisation d’approches avancées par le truchement des PRM nécessitera un apport diversifié en termes de capitaux, de compétences, d’approvisionnements en carburant et de politiques publiques. Cela nécessitera à son tour une approche nationale coordonnée afin de faire de cette technologie potentiellement transformatrice un vecteur clé de notre avenir énergétique.
Recommended Reading
Pour en savoir plus, allez à rbc.com/climat.
Télécharger le rapport
Contributors:
Auteur principal : Vivan Sorab, Premier directeur, Technologie propre
Steven Frank, Rédacteur en chef collaborateur
Caprice Biasoni, Graphiste spécialisée
- Ressources naturelles Canada : Le Canada présente son plan d’action pour la technologie des petits réacteurs modulaires
- Ressources naturelles Canada : COP28 : Déclaration qui vise à tripler la capacité de production d’énergie nucléaire (2023) (en anglais seulement)
- Ontario Power Generation: OPG working to deploy SMR fleet to help power Ontario’s clean energy future (en anglais)
- Ressources naturelles Canada : Feuille de route canadienne pour les petits réacteurs modulaires
- Plan d’action canadien des petits réacteurs modulaires (PRM)
- McMaster University: McMaster Nuclear Reactor (en anglais)
- Installation nucléaire – Réacteur de recherche SLOWPOKE-2 du Collège militaire royal du Canada
- Rolls-Royce Small Modular Reactors (en anglais)
- Chemical and Engineering News: Can small modular reactors at chemical plants save nuclear energy? (en anglais)
- The NEA Small Modular Reactor Dashboard: Second Edition (en anglais)
- World Nuclear Association: Small Nuclear Power Reactors (en anglais)
- Tennessee Valley Authority: Advanced Nuclear Solutions (en anglais)
- UK Research and Innovation: UK government invests £215 million into small nuclear reactors (en anglais)
- Ressources naturelles Canada : Le Canada lance un nouveau programme de financement pour les petits réacteurs modulaires
- Osler: Canada announces funding program to enable deployment of small modular reactors (en anglais)
- Banque de l’infrastructure du Canada : La BIC engage 970 millions de dollars pour le premier petit réacteur modulaire du Canada
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