- Le vieillissement démographique et la contraction de la main-d’œuvre par rapport à la population globale ont posé et continueront à poser des défis à l’économie canadienne.
- Au chapitre des taux d’activité, les immigrants font mieux que leurs homologues nés au Canada. Cela est particulièrement vrai pour les travailleurs immigrants âgés de 55 ans et plus, qui choisissent de plus en plus de continuer à travailler et de prendre leur retraite plus tard.
- Le prolongement de la carrière parmi les rangs des travailleurs immigrés est également assorti de meilleurs résultats sur le marché du travail. L’écart salarial entre les travailleurs immigrants et les travailleurs nés au Canada se réduit depuis le début des années 2010 et il se situe aujourd’hui à son niveau le plus bas depuis deux décennies.
- Point clé : Le fait que le taux d’activité des immigrants soit plus élevé contribue à atténuer les pressions démographiques alors que les membres de la génération du baby-boom continuent de prendre leur retraite, ralentissant ainsi le vieillissement de la main-d’œuvre canadienne.
Le vieillissement démographique pose des défis à l’économie
Les vagues de Canadiens quittant les rangs de la population active ont débuté il y a plus d’une décennie, alors que les premiers membres de l’importante génération du baby-boom ont commencé à atteindre l’âge de la retraite. Depuis lors, la part de la population canadienne participant activement au marché du travail – ce qui signifie qu’ils travaillaient ou qu’ils cherchaient du travail – n’a cessé de diminuer.
Une population vieillissante présente des défis pour l’économie car la demande en matière de biens et services continue à progresser à un rythme plus rapide que ne croît la population active apte à y répondre. Et alors que les taux de natalité observés au Canada continuent d’être inférieurs aux taux de reproduction, il est vraisemblable que le défi continuera à s’aggraver à long terme, imprimant une pression à la hausse sur la croissance des salaires. Ce phénomène crée également des défis pour les gouvernements, lesquels sont appelés à accroître le financement des services publics, comme les soins de santé, à partir d’une assiette fiscale qui se contracte (par rapport à la taille de la population.)
On a longtemps estimé que l’immigration constituait un moyen qui permettait de contribuer à compenser l’impact du vieillissement de la population et de ralentir le vieillissement de la main-d’œuvre canadienne. Bien que le taux d’activité des personnes nées au Canada ait continué à baisser à mesure que davantage de travailleurs prennent leur retraite, il a augmenté parmi la population immigrante. À la fin de 2020, la part des immigrants participant à la population active dépassait celle de la population née au Canada. Et au début de 2024, le taux d’activité des immigrants dépassait celui des travailleurs nés au Canada selon une proportion de 2 %.
Les immigrants prennent leur retraite plus tard et observent des écarts salariaux plus faibles
Ces résultats plus élevés s’expliquent en partie du fait qu’en moyenne les immigrants sont plus jeunes. Fait intéressant, les immigrants prennent également leur retraite plus tard que les travailleurs nés au Canada, ce qui contribue à atténuer davantage la vague de départs à la retraite. Les immigrants âgés d’au moins 55 ans, inclusivement, présentent en particulier un taux d’activité beaucoup plus élevé que leurs homologues nés au Canada faisant partie du même groupe d’âge. Selon nos calculs, au cours de la dernière décennie, l’âge moyen du départ à la retraite parmi les travailleurs immigrés a été d’environ 66 ans. Cet âge est plus élevé de deux ans que l’âge moyen du départ à la retraite des travailleurs nés au Canada, qui se fixe à 64 ans.
Les immigrants plus âgés participent plus à la population active
%, taux d’activité des travailleurs âgés de 55 ans et plus
Source : Statistique Canada, calculs de Services économiques RBC.
Le report du départ à la retraite ne constitue pas toujours une bonne chose pour l’économie, notamment lorsque c’est la nécessité qui est à l’origine de ce phénomène, par exemple du fait de problèmes d’accessibilité et du manque d’épargne, plutôt que simplement par choix. Cependant, le taux d’activité plus élevé des travailleurs immigrants plus âgés s’est accompagné de meilleurs résultats sur le plan du marché du travail pour les travailleurs immigrés de manière générale. Au Canada, les écarts d’emploi et salariaux des travailleurs issus de différents statuts d’immigration se sont resserrés au cours de la dernière décennie.
À la fin de 2023, l’écart des gains nominaux entre les travailleurs immigrants et les travailleurs nés au Canada avait chuté à son niveau le plus bas jamais enregistré. Un récent rapport de Statistique Canada met de l’avant plusieurs facteurs à l’origine de cette amélioration, facteurs parmi lesquels figurent les modifications apportées au processus de sélection des immigrants depuis le début des années 2010 ainsi que la présence d’un marché du travail relativement robuste à la fin des années 2010 et en 2022. Les salaires nominaux des travailleurs immigrants accusent toujours du retard par rapport à ceux des travailleurs canadiens, et ce, pour la plupart des occupations. Cependant, dans des domaines spécifiques tels que les sciences naturelles et appliquées, de même que l’art, la culture et les loisirs, leurs salaires horaires sont carrément plus élevés.
L’écart salarial des travailleurs immigrants au Canada
est moins important
Écart salarial mesuré sous forme de proportion de la rémunération horaire moyenne
des travailleurs non immigrants
Source : Statistique Canada, calculs de Services économiques RBC
Les pénuries de main-d’œuvre ne feront qu’empirer à long terme
Les pénuries de main-d’œuvre se sont atténuées quelque peu au cours de la dernière année. En effet, un niveau record d’immigration et des taux de croissance démographique sans précédent ont stimulé l’offre de main-d’œuvre. En parallèle, le nombre d’offres d’emploi a chuté par rapport à des niveaux exceptionnellement élevés alors que l’économie accuse le coup de taux d’intérêt élevés. Cependant, ces tendances devraient s’inverser. Selon nos propres prévisions, l’économie canadienne devrait commencer à se redresser au cours du second semestre de cette année à mesure que les taux d’intérêt commenceront à baisser et que les ménages surmonteront le choc lié à la hausse des coûts d’emprunt.
De surcroît, si l’immigration a accru l’offre de main-d’œuvre, elle stimulera vraisemblablement la consommation générale et entraînera du même coup une demande accrue en matière de travailleurs. Ce phénomène se produira tandis que la population continue à vieillir. Selon nos prévisions, le taux d’activité au Canada devrait reculer de plus de 2 % au cours de la prochaine décennie pour atteindre, en 2035, le niveau de 63,3 %, soit le niveau le plus bas depuis la fin des années 1970. Tout cela donne à penser que les entreprises canadiennes peuvent certainement s’attendre à une réapparition des pénuries de main-d’œuvre, avant que la situation s’aggrave au cours des décennies à venir.
Le vieillissement démographique est synonyme de déclin persistant du taux d’activité
%, taux d’activité, 15+
Source : Statistique Canada, projections de Services économiques RBC
Enfin, une augmentation de l’immigration pourrait ne pas constituer la solution miracle pour résoudre le défi démographique. Cependant, à mesure que les immigrants représentent une part de plus en plus importante de la population canadienne, leur taux d’activité plus élevé continuera d’atténuer les défis, ralentissant le vieillissement de la main-d’œuvre canadienne.
Claire Fan est économiste à RBC. Elle se concentre sur les analyses macroéconomiques et est chargée d’établir des prévisions relatives au PIB, à l’emploi et à l’inflation pour le Canada et les États-Unis, en fonction des principaux indicateurs.
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