Donald Trump s’est engagé à redéfinir l’ordre commercial mondial et par conséquent, la relation des États-Unis avec l’économie mondiale. Aussi troublant que cela puisse paraître, cette position n’est ni nouvelle ni soudaine. La réforme du commerce est un aspect prioritaire de la pensée politique américaine depuis l’effondrement du mur de Berlin, qui a mené à la disparition d’un contrepoids communiste au capitalisme mondial. Bien que la résistance puisse remonter aux premiers jours de l’ALENA, la fragilité de la confiance commerciale des États-Unis s’est réellement accentuée pendant la crise financière mondiale et les années qui ont suivi, la Chine s’étant enhardie à revendiquer un statut de grande puissance.

Le démantèlement brique après brique d’une autre structure dominante du 20e siècle est maintenant orchestré : le mur de soutien d’une économie mondiale, qui repose sur la protection militaire, les principes juridiques et la politique monétaire des États-Unis. La nouvelle guerre commerciale de 2025 concerne autant la Pax Americana Œconomia que tout autre chose et menace rapidement de créer une brèche massive dans le mur de soutien, d’une manière égale peut-être en conséquence à ce moment de 1989. C’est pourquoi certains conseillers de Trump ont qualifié ce moment de « changement générationnel » dans le secteur du commerce.

La forme de l’économie mondiale et son orientation à l’approche de 2030 sont en jeu, et peu de pays risquent autant que le Canada, parce que peu ont autant bénéficié de cette ère commerciale qui pourrait maintenant arriver à son crépuscule. Chaque pays est le plus grand client de l’autre, plus de 75 % des exportations canadiennes étant destinées aux États-Unis et 17,3 % des exportations américaines l’étant au Canada. Les échanges bilatéraux vont au-delà du volet commercial ; les deux voisins se sont appuyés l’un l’autre pour la sécurité énergétique et alimentaire, la sécurité militaire et économique, au moyen de normes et de principes alignés pour tout, des pièces de voiture et de l’aéronautique aux protocoles de télécommunications et aux principes informatiques.

Pour que le Canada puisse prospérer dans cette nouvelle ère de perturbations économiques, dans laquelle ces ententes à long terme peuvent maintenant être perpétuellement soumises aux caprices politiques et aux vues mercantiles, il lui faudra être plus stratégique. Certes, notre avenir sera davantage tributaire des droits de douane et des tirades, mais il sera façonné de manière plus durable par notre compréhension des enjeux fondamentaux des États-Unis et par notre capacité à nous y attaquer pour que le changement générationnel nous aide à renouveler notre économie. Parmi ces enjeux :

C’est la sécurité, idiot

Le programme économique de Trump est plus axé sur la sécurité que sur la prospérité. C’est pourquoi la sécurité et les politiques commerciales sont plus étroitement liées que ce que nous avons vu depuis des décennies, même si les États-Unis n’ont étonnamment pas livré de guerre pour des intérêts commerciaux depuis qu’ils se sont hissés à la tête des économies du monde. La menace des droits de douane n’est pas tant une technique coercitive pour obtenir un avantage dans le cadre d’accords bilatéraux et multilatéraux ; elle s’aligne plutôt sur une vision du monde nationaliste américaine. Dans les années à venir, nous pouvons nous attendre à ce que les États-Unis se concentrent sur l’hémisphère Nord, sur le plan de l’engagement militaire et commercial. Tant que les intérêts économiques des États-Unis ne seront pas menacés. Ce nouvel impératif exigera du Canada de jouer un rôle plus important dans la surveillance du commerce mondial.

La Terre n’est plus plate

Les gouvernements américains successifs ont suffisamment sapé l’Organisation mondiale du commerce pour la rendre considérablement insignifiante à l’égard des principales considérations commerciales. Trump est maintenant déterminé à refaçonner le système plus large, en ciblant le régime tarifaire préférentiel que les États-Unis ont créé après la guerre froide pour stimuler la croissance des économies alliées et en développement. Le taux tarifaire effectif aux États-Unis, qui est d’environ 3 %, est le plus bas parmi les principales économies. Le taux effectif de l’Union européenne sur les importations est de 5 %, celui de la Chine de 10 % et celui du Bangladesh, de 155 %, le plus élevé au monde. La réorientation du commerce mondial qui en résultera compliquera les ambitions du Canada au chapitre de la diversification des exportations.

Le roi Dollar roi est mort ? Vive le roi Dollar

À la base des déficits commerciaux des États-Unis est leur position très inconfortable en tant que filet de sécurité pour l’économie mondiale. Le dollar américain, en tant que monnaie de réserve, continue d’attirer des capitaux vers les États-Unis, ce qui rend ses exportations moins concurrentielles. La force du dollar rend son coût d’emprunt moins cher qu’il ne devrait l’être, ce qui permet aux gouvernements et aux consommateurs de profiter pleinement du crédit, ainsi qu’à une série d’administrations d’enregistrer des déficits budgétaires, qui ne contribuent pas à rendre les États-Unis de nouveau concurrentiels. Comme la première économie mondiale est devenue une machine de consommation, elle s’est de plus en plus appuyée sur les importations, et elle a un besoin croissant de trouver des importations moins chères pour ne pas alimenter l’inflation. Le Canada devra se joindre à d’autres pays pour aider à rééquilibrer les monnaies mondiales.

Beaucoup ont mentionné la nécessité d’une nouvelle version des Accords du Plaza – conclus en 1988, après le krach boursier de l’année précédente, qui ont aidé à revaloriser le dollar par rapport aux autres grandes devises. La tâche s’avérerait beaucoup plus difficile aujourd’hui, étant donné la prédominance du dollar sur toutes les autres devises, qui représente environ 60 % des 12 000 milliards de dollars de réserves de change du monde. En outre, depuis 1988, la dette des États-Unis a triplé en pourcentage du PIB. Dans le meilleur de deux mondes, une transition à long terme inciterait les principaux partenaires commerciaux des États-Unis, y compris le Canada, à se partager certains des coûts cachés d’une monnaie de réserve.

Ce sont là quelques-unes des pressions stratégiques auxquelles les États-Unis sont confrontés et qui sont intégrées à leur approche commerciale. Ils ont besoin d’aide pour contrôler le commerce mondial, y compris les voies maritimes. Ils ont besoin que les autres pays augmentent leurs importations de biens américains, y compris d’énergie. Et ils ont besoin de partenaires pour atténuer les pressions à long terme sur le dollar américain et même pour payer une partie du coût d’exploitation d’une monnaie de réserve (au moyen du resserrement de la politique budgétaire ou monétaire).

Compte tenu de ces importantes forces en jeu, nous pouvons nous attendre à ce que les États-Unis continuent de faire pression pour que des réformes commerciales soient adoptées, peut-être radicalement.

Ce que cela signifie pour le Canada

Il est peu probable que des droits de douane généralisés de 25 % soient appliqués, compte tenu des répercussions qui se feraient sentir sur l’économie et les consommateurs américains. Toutefois, les Canadiens ne devraient pas perdre de vue leur incidence potentielle : selon les Services économiques RBC, une telle hausse des droits ferait grimper le taux de chômage au-dessus de 8 %, réduirait la croissance du PIB de moitié cette année et augmenterait de 2,5 % les prix à la consommation. Elle coûterait aussi aux consommateurs américains 1 200 dollars américains par an en moyenne.

Une telle modélisation constitue un défi dans la mesure où les droits ne sont jamais appliqués de façon isolée. Il faut aussi tenir compte de la probabilité de contre-mesures tarifaires, voire d’escalade, ainsi que des répercussions sur le dollar canadien. Un autre facteur est la capacité des entreprises à absorber le coût des droits de douane, grâce à des gains d’efficience et à la compression des marges. De nombreuses entreprises canadiennes ont laissé entendre qu’elles pourraient absorber des droits de 10 %, en divisant le coût en trois environ – pour les consommateurs, les intermédiaires et pour leur propre compte. En fait, les marges bénéficiaires du Canada ont atteint des niveaux relativement élevés, en partie en raison du dollar à 70 cents et des problèmes de capacité aux États-Unis, y compris les pénuries de main-d’œuvre.

Mais ce n’est qu’une seule mesure, selon la norme de l’état des résultats. Les politiques commerciales imprévisibles de l’administration Trump ont aussi un effet insidieux sur la confiance des investisseurs. L’indice d’incertitude de la politique économique pour le Canada a atteint un record, soit quatre fois plus que sa moyenne sur 20 ans, et bien au-dessus du niveau atteint pendant la pandémie de COVID-19. Les activités de fusion et d’acquisition ont également ralenti, tout comme les intentions d’investissement dans la machinerie et l’équipement. D’autres répercussions négatives émergent tandis que les entreprises stockent des intrants et exportent leurs produits avant l’imposition anticipée des droits de douane et d’obstacles au commerce intérieur. Nous en avons vu des signes en janvier, alors que les fabricants se dépêchaient de faire passer la frontière à leurs produits, même au prix d’une gestion de stocks plus importants.

Cette réaction – ou mesure préventive – pourrait entraîner un ralentissement industriel au cours des trimestres à venir. Ajoutez à cela un fléchissement prévu de la confiance des consommateurs, car les Canadiens ont pris connaissance des attentes de pertes d’emplois, de fermetures d’entreprises et de besoins en soutien gouvernemental, qui pourraient entraîner des baisses de taux d’intérêt.

Dans ce contexte, la Banque du Canada est confrontée à un dilemme aussi difficile que pendant la pandémie, lorsque le secteur économique de l’offre a été paralysé. Les droits de douane peuvent simultanément freiner la croissance économique et faire grimper les prix. La décision de rajuster les taux d’intérêt dépendra de l’effet le plus dominant (inflationniste ou déflationniste). Comme ce fut le cas lors de la pandémie, la décision reposera en grande partie sur l’innovation et la créativité des entreprises pour gérer le choc, ce que nous avons tendance à constater seulement avec du recul.

Enfin, et ce sera tout aussi difficile pour la Banque du Canada, les gouvernements fédéral et provinciaux prendront probablement d’importantes mesures de soutien pour les entreprises et les travailleurs touchés, y compris des subventions et des allégements fiscaux. Cela sera politiquement nécessaire et économiquement risqué, car elles pourraient peser sur les finances publiques, influer sur la cote de solvabilité du Canada et se révéler procycliques si elles coïncident avec des baisses de taux d’intérêt.

Composer avec l’incertitude

Bien que l’incidence exacte des droits de douane sur l’économie canadienne demeure incertaine, nous savons par expérience et par les données économiques fondamentales antérieures quelles répercussions de telles perturbations commerciales pourraient entraîner.

La première chose à reconnaître est que les secteurs sensibles au commerce seront les plus vulnérables. Les droits de douane sont des taxes sur le mouvement et non sur la production des biens. Par conséquent, les secteurs qui dépendent fortement du commerce transfrontalier, comme la fabrication automobile, courent le plus grand risque. Des décennies de libre-échange ont mené à la création de chaînes logistiques profondément intégrées, où les produits traversent la frontière à plusieurs reprises au cours du processus de production. Cela signifie que les droits de douane peuvent s’appliquer plusieurs fois au cours du même cycle de production, faisant grimper les coûts. Le secteur de l’automobile est le plus souvent cité, mais il existe des exemples semblables dans la plupart des secteurs : les homards du Maine, par exemple, sont envoyés au Canada pour traitement, puis retournés sur le marché américain. Dans l’ensemble, plus de 60 % du secteur manufacturier canadien a des flux commerciaux avec les États-Unis qui représentent au moins le double de leur production nationale.

De plus, même si le Canada n’impose pas de droits de représailles, les droits américains peuvent à eux seuls nuire indirectement aux entreprises canadiennes. En raison de la forte intégration entre les secteurs manufacturiers des États-Unis, du Canada et du Mexique, les droits de douane sur les importations industrielles américaines feront grimper les coûts pour les exportateurs américains. Cela fera ensuite augmenter le prix des biens que le Canada importe des États-Unis, créant un effet inflationniste. L’OCDE estime qu’une bonne partie =des importations américaines sont en fait des biens de fabrication américaine qui ont été exportés pour transformation puis réimportés. Les chaînes logistiques manufacturières nord-américaines souffriront donc davantage des droits de douane que celles de l’Asie ou de l’Europe.

L’acier et l’aluminium sont manifestement dans la mire de Trump, en partie parce qu’il a dit croire que sans acier, on n’a pas de pays. Plus de 90 % des exportations canadiennes d’acier et d’aluminium sont destinées aux États-Unis, ce qui signifie que ces droits ont une incidence directe sur près de 24 milliards de dollars de produits canadiens. Toutefois, la relation commerciale est étroitement interdépendante – le Canada est aussi le plus important fournisseur de ces métaux aux États-Unis, soit environ 20 % de leurs importations d’acier et 50 % de leurs importations d’aluminium. En 2024, les importations américaines d’acier canadien ont totalisé 7,5 milliards de dollars, contre 9,4 milliards de dollars pour les importations d’aluminium.

Bien que le Canada conserve un excédent commercial au sein de ces secteurs (14 milliards de dollars en 2024, dont 11 milliards de dollars de l’aluminium), leur contribution globale à l’économie nationale demeure relativement faible. L’acier et l’aluminium ne représentent que 0,5 % du PIB et des emplois du Canada et environ 3 % des exportations totales. Les provinces les plus touchées sont le Québec et l’Ontario, où ces secteurs représentent respectivement 1 % et 0,6 % du PIB.

Le marché américain dispose de peu de solutions pour remplacer ces produits. L’expérience des droits de douane en 2018-2019 a démontré que les producteurs américains ont du mal à remplacer l’acier et l’aluminium canadiens. La plupart des autres fournisseurs sont également confrontés à des droits et la capacité de production ne peut pas être augmentée rapidement. De nombreux produits spécialisés sont difficiles à remplacer, ce qui oblige les importateurs américains à absorber des coûts plus élevés. Fait intéressant, malgré les droits imposés en 2018, les importations américaines de produits en acier ont augmenté, le Canada, le Mexique et l’Europe augmentant légèrement leur part de marché. Au Canada, l’emploi dans les secteurs de l’acier et de l’aluminium a augmenté de 4 % en 2018 et de 6 % en 2019. Entre-temps, la capacité de production d’acier et d’aluminium aux États-Unis a en fait diminué au cours de la période d’imposition des droits.

Ce que le Canada peut faire

À court terme, le Canada risque de se retrouver dans une lutte tarifaire avec son plus grand partenaire commercial, à la fois prenant et donnant des coups. Nous devons aussi penser à long terme en investissant simultanément dans notre propre diversification commerciale tout en explorant des façons d’aider les États-Unis à s’attaquer à leurs enjeux économiques de longue date. À long terme, ils seront aussi nos enjeux.

Nous pouvons commencer par nos ressources naturelles, et pas seulement parce que Trump les a citées comme cibles. Le Canada doit continuer de mettre de l’avant son rôle essentiel dans le domaine de l’énergie et de la sécurité économique aux États-Unis, en mettant l’accent sur la richesse de ses ressources dans le but d’éviter les menaces américaines de mesures commerciales.

De plus, l’accent mis au Canada sur le développement de marchandises clés peut stimuler la croissance industrielle et le PIB, attirer des investissements et accroître la participation des Autochtones, ce qui rendrait le Canada plus indispensable aux intérêts américains. La diversification géographique des exportations canadiennes de ressources est également essentielle, car l’expansion du commerce au-delà des États-Unis atténue les risques. Washington reconnaît déjà l’importance des ressources du Canada, ce qui offre un avantage de négociation. En accordant la priorité à l’énergie, à l’agriculture et aux minéraux critiques, le Canada peut renforcer sa position de partenaire clé dans le commerce mondial et la stabilité économique des États-Unis.

Considérons seulement l’importance de ces marchandises pour l’économie américaine.

Les exportations canadiennes de pétrole, de gaz naturel et d’électricité jouent un rôle crucial dans la stabilisation des réserves d’énergie aux États-Unis. Les pipelines intégrés et les réseaux électriques transfrontaliers facilitent un approvisionnement continu en énergie, tandis que les expansions comme le pipeline Trans Mountain permettent au Canada d’accroître sa capacité de desservir les marchés américains et internationaux.

Le Canada fournit 60 % des importations américaines de pétrole, en particulier de brut lourd, qui est vital pour les raffineries américaines. Sans pétrole brut canadien, les raffineries américaines seraient confrontées à un réoutillage coûteux ou dépendraient de fournisseurs plus risqués comme le Vénézuéla et le Moyen-Orient. De même, le Canada fournit 90 % des importations d’électricité aux États-Unis, offrant une énergie propre et économique qui soutient des secteurs de haute technologie comme l’intelligence artificielle et la fabrication de pointe. De plus, le Canada fournit 99 % des importations américaines de gaz naturel, qui est essentiel pour répondre à la demande croissante d’énergie au pays, particulièrement dans le contexte de production nationale qui peine à suivre le rythme.

Le Canada contribue aussi de façon essentielle à la sécurité alimentaire des États-Unis, en leur fournissant des produits agricoles clés qui soutiennent la production alimentaire et de biocarburants aux États-Unis. Comme les États-Unis sont confrontés à des pénuries de main-d’œuvre potentielles en raison des politiques d’immigration, le rôle du Canada dans l’approvisionnement alimentaire en Amérique du Nord deviendra encore plus crucial.

Le Canada fournit 98 % des importations américaines d’huile de canola, un ingrédient essentiel à la transformation des aliments et à la production de biocarburants. De plus, les États-Unis importent 34 % de leur viande du Canada, en particulier du bœuf et du porc, qui sont profondément intégrés aux chaînes logistiques nord-américaines. Le Canada fournit aussi 85 % des importations américaines de potasse, un composant essentiel des engrais qui favorisent le rendement des cultures, surtout en raison des enjeux agricoles liés au climat.

Enfin, alors que les États-Unis cherchent à réduire leur dépendance à la Chine et à la Russie au chapitre des minéraux critiques, le Canada a l’occasion de renforcer son rôle de fournisseur clé dans des secteurs comme l’énergie propre, les semi-conducteurs et la défense. Le Canada fournit actuellement 19 % des importations américaines de minéraux critiques, y compris des ressources essentielles comme le nickel, l’aluminium et le zinc. Grâce à des investissements et à un soutien politique adéquats, le Canada pourrait accroître sa capacité dans ces secteurs.

Par ailleurs, le Canada est un partenaire essentiel du secteur américain de l’énergie nucléaire, puisqu’il fournit 27 % des importations américaines d’uranium. Alors que les États-Unis cherchent à accroître leurs capacités en énergie nucléaire, les technologies canadiennes de pointe d’extraction, de transformation et de petits réacteurs modulaires peuvent aider à combler les lacunes du cycle de combustible nucléaire nord-américain.

Pour maximiser les avantages que présentent ses ressources, le Canada doit investir dans les infrastructures, créer un environnement réglementaire stable et attirer des capitaux pour le développement à long terme. L’élargissement des partenariats commerciaux mondiaux, en particulier en Asie et en Europe, peut réduire la dépendance excessive du Canada aux États-Unis tout en assurant sa résilience face à l’évolution de la dynamique géopolitique.

Mais à long terme, le Canada ne peut pas toujours enregistrer d’importants excédents commerciaux dans ces secteurs, puisque ces déséquilibres ont pour effet dérivé de déstabiliser la plus grande économie mondiale. Nous pouvons rechercher d’autres marchés pour ces ressources et chercher à acheter davantage de produits liés aux ressources des États-Unis, que ce soit de l’uranium enrichi ou des aliments emballés. Seulement si les États-Unis sont intéressés par une approche négociée des balances commerciales, bien sûr.

À ce chapitre, une renégociation accélérée de l’accord commercial de l’AEUCM semble inévitable et dans l’intérêt du Canada. Une résolution rapide des incertitudes et des frustrations persistantes en regard de l’accord initial pourrait réduire l’incertitude qui accompagne les menaces tarifaires de Trump. Une renégociation – idéalement, sans menace de droits de douane – pourrait aider à aborder les préoccupations commerciales dans la nouvelle économie numérique, y compris le respect par le Canada d’une taxe de vente numérique. Les préoccupations persistantes à l’égard du secteur canadien du bois d’œuvre et des produits laitiers pourraient également être résolues, ce qui contribuerait à la création d’un nouvel accord susceptible de renforcer la valeur de l’Amérique du Nord pour les investisseurs mondiaux. L’accord peut faire plus, au profit du Canada, pour inclure les droits de la personne et les normes environnementales dans les échanges commerciaux nord-américains. Les trois pays devraient cependant se rappeler les avantages mutuels de l’accord, même sous sa forme actuelle. Moins de cinq ans après sa mise en œuvre, le commerce nord-américain a grimpé de 47 %, soutenant 9 millions d’emplois.

De façon plus générale, grâce à la restauration de la bonne foi entre les gouvernements, le Canada peut contribuer à la création d’un nouveau cadre stratégique pour l’Amérique du Nord, y compris l’approvisionnement en minéraux critiques, la défense de l’Arctique et les approches communes à l’égard d’une autre frontière économique, l’espace.

Alors que le Canada fait face à l’incertitude économique qu’engendrent les politiques tarifaires américaines, ce genre d’approche stratégique et proactive est essentiel. La relation commerciale entre le Canada et les États-Unis est profondément intégrée et repose sur une dépendance mutuelle, le Canada fournissant des ressources critiques, de l’énergie et des biens industriels qui renforcent les intérêts des États-Unis sur le plan de la sécurité économique et nationale. Bien que les droits de douane présentent des obstacles immédiats, ils soulignent également la nécessité pour le Canada de tirer parti de ses forces économiques dans le cadre des négociations commerciales, de diversifier ses partenariats mondiaux et d’investir dans la résilience industrielle à long terme.

En mettant l’accent sur son rôle indispensable dans les secteurs de l’énergie, de l’agriculture et des minéraux critiques, le Canada peut se positionner non seulement comme un partenaire commercial clé des États-Unis, mais aussi comme un chef de file sur les marchés mondiaux. Développer les infrastructures, favoriser l’innovation et garantir des environnements d’investissement stables seront cruciaux pour soutenir la croissance. Bien que les politiques protectionnistes puissent influer sur la dynamique commerciale à court terme, la capacité du Canada à s’adapter et à renforcer ses avantages concurrentiels influera sur sa prospérité économique à long terme dans un contexte mondial en constante évolution.

L’équipe Leadership avisé RBC a lancé une campagne s’échelonnant sur plusieurs mois en partenariat avec The Hub. La série de ce mois-ci porte sur les droits de douane, le commerce et les occasions pour le Canada dans ce nouvel ordre économique. N’oubliez pas de rester à l’affût du lancement de DeepDive.

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