Le secteur canadien des sciences de la vie se caractérise depuis longtemps par son dynamisme. Qu’il s’agisse de mise au point de médicaments ou d’innovation en santé, son écosystème de chercheurs de réputation mondiale a fait de notre pays un chef de file. Devenu moteur de croissance économique et lui-même en pleine expansion, le secteur contribue à former ou à attirer des scientifiques de haut vol.
Pourtant, notre secteur des sciences de la vie montre des signes de faiblesse. Les chercheurs n’ont pas toujours la capacité de commercialiser avec succès leurs découvertes pourtant révolutionnaires. C’est peut-être en partie pour cela que les entreprises pharmaceutiques canadiennes ont de plus en plus de mal à répondre aux besoins du pays en médicaments – de fait, le Canada, jusqu’ici pays exportateur net, est devenu importateur net. La part de son budget qu’il consacre au secteur des sciences de la vie le place d’ailleurs derrière ses pairs du G7 et de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique).
Les voyants commencent à clignoter alors que l’économie canadienne est en difficulté. Notre productivité générale – la valeur économique générée par heure de travail – souffre d’un manque d’investissements. L’élan qui avait marqué le tournant du siècle ne s’est pas maintenu et, dans son ensemble, le Canada n’est plus aussi prospère. S’il veut relever le défi de la croissance à long terme, notre pays doit renforcer les secteurs à fort rapport économique – celui des sciences de la vie, par exemple, qui s’est révélé un puissant catalyseur au cours des dernières décennies.
Un réexamen sérieux nous permettrait de tirer profit des possibilités gigantesques qu’offre un secteur dont la valeur mondiale est évaluée à plus de 2 800 milliards de dollars américains. Son renforcement chez nous aurait en outre des retombées sur les autres secteurs de pointe canadiens axés sur la science et la technologie.
Un changement de perspective pourrait avoir des répercussions au-delà de la sphère économique. En mettant à l’épreuve nos systèmes de santé et les chaînes d’approvisionnement mondiales, la pandémie de COVID-19 a montré que le Canada doit renforcer sa capacité de production, afin de pouvoir subvenir à ses propres besoins en cas de crise sanitaire. Le monde s’attend à connaître plus fréquemment de telles crises (pandémies ou autres), au moins dans un avenir assez rapproché, du fait des changements climatiques, de la mondialisation et de l’urbanisation. Il sera donc de plus en plus important de pouvoir nous doter nous-mêmes des vaccins et des traitements nécessaires. Par ailleurs, en raison de l’accroissement et du vieillissement de la population, la consommation de produits en tous genres liés à la santé ne fera qu’augmenter.
Pour se renforcer et atteindre son plein potentiel, le Canada a donc de grands défis à relever. Certaines solutions exigent de financer davantage, d’autres, de soutenir différemment le secteur des sciences de la vie, par exemple en coordonnant mieux l’action des intervenants publics et privés. Moyennant une politique nationale bien conduite, le secteur continuera de contribuer à notre résilience économique et à préparer le pays à affronter les futures crises de santé publique.
Principals Constatations
- Le secteur des sciences de la vie est depuis longtemps l’un des fleurons canadiens en matière de recherche-développement (R-D) mais, qu’il s’agisse d’investissements ou de talents, il fait à présent face à une concurrence de plus en plus vive sur la scène mondiale.
- Il est urgent d’investir dans les infrastructures liées à l’intelligence artificielle (IA) et de revoir les politiques d’encouragement des investisseurs privés, compte tenu des carences chroniques et croissantes auxquelles sont en butte les chercheurs et les entreprises du secteur canadien des sciences de la vie, notamment ceux qui se consacrent à la mise au point de nouveaux médicaments, toujours longue et coûteuse.
- Canada aurait tout à gagner d’une meilleure coordination entre les secteurs de l’IA et des sciences de la vie. Qu’elle s’applique aux politiques ou aux moyens mis en œuvre, cette coordination aiderait le pays à demeurer un chef de file mondial en matière d’innovation et de mise au point de nouveaux médicaments.
- Le développement à grande échelle de l’innovation ainsi que l’étoffement et le maintien en sol canadien de sa propriété intellectuelle (PI) passent pour le Canada par un meilleur soutien à la commercialisation, donc par des politiques plus favorables, mais aussi par un accès plus facile – et selon des mécanismes mieux coordonnés – aux ressources appropriées et aux sources de financement.
- Dans la sphère publique ou privée, les décideurs doivent donner la priorité aux mesures permettant d’attirer et de conserver des chercheurs et des innovateurs de pointure internationale, compte tenu des problèmes systémiques auxquels fait face le pays dans le secteur des sciences de la vie.
Où nous en sommes et ce qui nous y a conduits
Discipline en rapide évolution, les sciences de la vie englobent tout un éventail d’activités visant à la préservation et à l’amélioration de la santé. C’est le domaine de la biofabrication (mise au point de vaccins à partir d’organismes vivants), de l’industrie pharmaceutique (qui produit des médicaments à partir de substances chimiques et de synthèse) et des fabricants d’équipements d’aide au diagnostic, d’appareils médicaux personnels, etc.
Plus de 2 000 entreprises œuvrent dans ce secteur au Canada ; elles emploient 220 000 personnes. Il s’agit avant tout d’activités de recherche-développement menées dans des laboratoires publics ou privés et conduisant à diverses formes de propriété intellectuelle qui font progresser les sciences de la santé – par exemple, les formulations pharmaceutiques ou les brevets pour équipements médicaux qui sont achetés (souvent par des sociétés privées étrangères) en vue de la commercialisation de nouveaux produits auprès des établissements de santé et des consommateurs.
Il n’est pas facile de déterminer précisément l’impact des sciences de la vie sur le produit intérieur brut du Canada, car l’État ne fournit pas les indicateurs voulus (nombre d’entreprises du secteur, effectifs, contribution au PIB, taux de croissance annuel…). L’évaluation de la vigueur et du potentiel de croissance de cette branche d’activité est d’autant plus difficile que tous les analystes ne s’entendent pas sur les sous-secteurs à prendre en considération. De surcroît, les disciplines de pointe comme l’étude des biotechnologies ne portent pas seulement sur la santé humaine, mais aussi sur celle des animaux et des plantes.
Ce qui est certain, toutefois, c’est que le secteur canadien des sciences de la vie, par sa taille et son champ d’action, joue un rôle économique important – et qui ne fait que croître. À lui seul, le sous-secteur des activités de recherche-développement entourant les médicaments a représenté 16 milliards de dollars en 2021 (environ 0,7 % du PIB canadien), répartis majoritairement entre l’Ontario (8,2 G$, soit la moitié) et le Québec (3,2 G$).
Le secteur dans son ensemble présente d’autres intérêts pour le Canada. Il permet à des spécialistes hautement qualifiés de se perfectionner et de demeurer au pays, malgré des compétences très convoitées à l’étranger. Leurs travaux de recherche et les produits ou services qu’ils conçoivent suscitent une très forte demande, en rapport direct avec les besoins grandissants du secteur de la santé canadien, lequel est censé connaître un taux de croissance annuel de 10 % au cours de la prochaine décennie.
Depuis plus d’un siècle, le Canada occupe une place particulièrement importante dans l’univers des sciences de la vie ; en matière d’hygiène personnelle comme de santé publique, on lui doit des progrès extraordinaires. Ce sont des chercheurs de l’Université de Toronto qui ont découvert l’insuline dans les années 1920 puis, dans les années 1960, les cellules souches. Dans les années 1980, des scientifiques montréalais ont mis au point des traitements révolutionnaires contre le sida et l’infection à VIH. L’un des trois chercheurs auxquels la découverte d’un vaccin contre l’hépatite C a valu le prix Nobel en 2020 était Michael Houghton, professeur à l’Université de l’Alberta.
On doit toutes ces découvertes à l’aide de l’État et à l’écosystème de réputation internationale dont est doté le Canada en matière de R-D et d’innovation. Établi principalement à Toronto, à Montréal et à Vancouver, l’univers des sciences de la vie consiste en un réseau intersectoriel remarquablement énergique constitué, à l’échelle nationale, d’universités, de laboratoires de recherche et d’organismes publics ou privés. On y trouve des centres de recherche subventionnés par les gouvernements, des universités de pointe (dont beaucoup possèdent leurs propres centres de recherche), des PME et de grandes multinationales établies au Canada (notamment Johnson & Johnson, AstraZeneca et Pfizer).
Le pays possède certains des autres ingrédients nécessaires au dynamisme du secteur des sciences de la vie. C’est en effet l’un des chefs de file internationaux de l’intelligence artificielle – ses trois instituts sont reconnus comme parmi les meilleurs au monde et plusieurs grands experts en apprentissage machine sont établis au Canada. Pour un chercheur, le fait de travailler dans l’un des pays les plus multiculturels au monde présente un autre avantage : l’accès facilité à des données sanitaires qui sont peut-être les plus diversifiées qui soient.
Le Canada a certes étoffé ses capacités techniques en sciences de la vie, mais les autres pays sont pas en reste. Ces deux dernières décennies, par rapport à nos pairs de l’OCDE (qui compte 38 membres), nous avons perdu du terrain au chapitre des investissements et des dépenses en R-D consacrées au secteur en question. À peu près tous les indicateurs concernant la participation et les investissements placent les États-Unis largement en tête des pays développés. Le Canada se distingue toutefois sur un point : depuis 20 ans, la proportion de chercheurs au sein de la main-d’œuvre canadienne s’est accrue de 45 % ; elle est aujourd’hui supérieure à la moyenne de l’OCDE.
Du fait du sous-investissement, le Canada doit, pour satisfaire à certains de ses besoins névralgiques, s’en remettre de plus en plus aux autres pays. Autrefois exportateur net, le pays est aujourd’hui importateur net des produits que réclame le maintien en santé de sa population de plus en plus nombreuse et qui vieillit – depuis 2016, le déficit commercial a triplé en ce qui concerne les médicaments. Le Canada importe actuellement 85 % des vaccins et des traitements dont il a besoin, alors que ses dépenses en santé continuent d’augmenter, notamment en ce qui a trait aux médicaments.
Les forces en jeu font généralement abstraction des frontières, et il n’est pas facile de rester concurrentiel quand augmente le coût des actifs nécessaires et du développement de la propriété intellectuelle. La mise en marché d’un nouveau médicament peut exiger plus de dix ans et des milliards de dollars, dont la moitié en essais cliniques – qui, d’après une étude menée en 2022, échouent 90 % du temps. Malgré les bonds technologiques réalisés, il est difficile, dans certaines disciplines, d’obtenir un rendement des investissements suffisant : depuis le milieu du 20e siècle, le nombre de nouveaux médicaments produits, ramené au montant des fonds nécessaires à leur mise au point, a régulièrement diminué.
Les difficultés du Canada sont d’autant plus grandes que son marché intérieur est relativement réduit, ce qui rend souvent la commercialisation des médicaments à peine viable. Résultat : des sociétés étrangères achètent les brevets canadiens et mettent les produits en marché dans des conditions plus favorables ou plus rentables – parfois, en débauchant les chercheurs…
La concurrence dont font l’objet les moyens en jeu et, plus généralement, les besoins d’un système de santé de plus en plus sollicité – sans parler des budgets de la santé, qui explosent – montrent combien il faut changer de perspective et soutenir davantage la productivité et l’innovation dans le secteur canadien des sciences de la vie. Sur ce plan, le Canada possède déjà de nombreux atouts. Comment les faire fructifier et comment conjuguer les forces en présence afin de donner toutes ses chances au secteur en jeu ?
Défis et solutions – que faire pour rester concurrentiel
L’IA au service de la découverte et de la mise au point de médicaments
Défi à relever:
Pour le secteur canadien des sciences de la vie, l’intelligence artificielle peut être un catalyseur de premier ordre. Les ensembles de données utilisés dans ce domaine (notamment quand il s’agit d’organismes vivants) sont très grands et particulièrement complexes ; c’est justement en pareil cas que l’IA est d’un grand secours. Elle permet en effet d’énormes gains d’efficacité et de productivité, puisqu’il devient possible de traiter rapidement de nombreuses données, d’en tirer de l’information et de faire des pronostics, pour déterminer par exemple les structures moléculaires les plus propres à la mise au point d’un nouveau médicament. Qu’il s’agisse d’efficacité ou de revenus, le secteur des sciences de la vie est l’un de ceux qui peuvent tirer le plus de profit de l’intelligence artificielle.
L’IA recèle bien des promesses pour l’ensemble de l’écosystème et de la chaîne de valeur des sciences de la vie. À eux deux, l’Ontario et le Québec constituent un pôle en innovation dans lequel intelligence artificielle et soins de santé font bon ménage – à Montréal, l’entreprise Deep Genomics met au point de nouveaux médicaments grâce à l’IA ; à Toronto, c’est également l’un des outils qu’emploient les chercheurs de l’institut Vector spécialisés en génomique et en diagnostics médicaux.
L’utilisation de cette technique ne continuera toutefois de progresser qu’à condition de disposer de l’infrastructure voulue. La capacité de traitement combinée requise pour mettre au point et utiliser des systèmes à intelligence artificielle exige souvent autant d’électricité qu’il en faut pour alimenter de grandes agglomérations. En outre, à mesure que ces systèmes se généralisent et deviennent plus puissants, les ressources nécessaires sont de plus en plus en demande. Or la capacité de traitement totale du Canada est, au sein du G7, l’une des plus faibles. François-Philippe Champagne, ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie du Canada, l’a dit plus tôt cette année : « Les cerveaux, nous les avons. Ce qu’il nous faut maintenant, c’est l’infrastructure. »
La demande combinée en outils d’IA et en puissance de traitement provoque déjà un goulot d’étranglement : dans presque tous les secteurs, cette ressource stratégique mais coûteuse fait chroniquement défaut aux chercheurs et aux entreprises.
Solutions:
La vitalité des sciences de la vie dépend de la robustesse de l’infrastructure technologique. La garantie d’une capacité suffisante de traitement par l’IA exige de débloquer rapidement des fonds publics et privés, sans quoi des entreprises pourraient envisager de s’adresser ailleurs qu’au Canada, avec tous les problèmes à long terme que cela impliquerait. La coopération entre secteur public et secteur privé contribuerait certainement à combler l’écart, ce qui rassurerait les futurs investisseurs.
Comment inverser la tendance au sous-financement de la recherche et du développement
Défi à relever
L’insuffisance des investissements consentis pour l’infrastructure de traitement par intelligence artificielle est révélatrice du problème plus vaste dont pâtissent les sciences de la vie : au sein de l’OCDE, le Canada fait moins bien que la moyenne en ce qui a trait aux dépenses en R-D ramenées au PIB, et ce, depuis au moins 1991 ; l’écart (encore plus grand quand on compare le Canada aux États-Unis) est dû en grande partie aux efforts insuffisants du gouvernement fédéral et des entreprises.
Les apports ponctuels de fonds publics n’y changent rien. Le gouvernement fédéral s’est engagé à consacrer plus de 2,4 milliards de dollars aux sciences, à la technologie et à l’innovation en 2014, 2,2 milliards à la biofabrication et aux sciences de la vie en 2021, et 2,4 milliards en 2024 dans le cadre de sa stratégie IA nationale. Pourtant, la part du PIB que représentent les investissements en R-D diminue depuis deux décennies.
Cette faiblesse relative de l’effort en recherche-développement constitue un problème particulièrement aigu pour les sciences de la vie qui, davantage que la plupart des autres disciplines, font appel à des essais intensifs et coûteux.
Solutions:
Pour que le secteur demeure un chef de file mondial et attire de nouveaux investissements, les acteurs publics et privés nationaux vont devoir prendre en main le problème du financement. En outre, si l’État consentait – sans qu’intervienne l’opportunisme politique – à un mécanisme financier permanent, l’ensemble du secteur y gagnerait. Le premier objectif devrait être d’atteindre au minimum la moyenne observée au sein de l’OCDE.
Un financement qui privilégie la R-D au détriment de la mise en marché
Défi à relever
L’écosystème canadien des sciences de la vie s’appuie sur de solides mécanismes de financement, par exemple le Fonds stratégique pour l’innovation (FSI) et la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI). Grâce à de tels programmes fédéraux, des milliards de dollars viennent financer des projets de recherche et aider les laboratoires des universités, des hôpitaux et des sociétés publiques ou privées.
Par contre, seule une fraction de la manne accordée vise à aider les chercheurs à commercialiser leurs découvertes : environ 80 % des fonds versés au secteur des sciences de la vie servent à soutenir les travaux de recherche-développement. Cela ne facilite pas la vie des chercheurs qui ont du mal à trouver un partenaire commercial, par exemple une société de capital-risque capable de régler les frais de préparation des documents financiers ou juridiques (brevets et autres), sans parler des méandres des approbations réglementaires.
La faiblesse relative du financement consacré aux activités de mise en marché des entreprises spécialisées en sciences de la vie (dont les projets sont trop vite jugés insuffisamment avancés) est particulièrement frappante quand on considère les capitaux disponibles aux États-Unis, qui attirent davantage les investisseurs étrangers. Tout cela n’invite pas les sociétés canadiennes à s’engager dans des projets à long terme.
C’est peut-être la principale raison pour laquelle le Canada réussit moins bien que ses pairs à passer de l’innovation à des réalisations pleine grandeur. Les statistiques gouvernementales montrent que la majorité des produits demeurent au stade du développement ou de la précommercialisation. Le Canada est d’autant moins compétitif qu’il compte moins d’habitants que les autres pays du G7 – plus le marché est petit, moins il incite à commercialiser de nouveaux produits.
Tout cela peut aussi expliquer le déficit commercial canadien observé dans le secteur pharmaceutique, alors même que le pays figure en tête du G7 en matière de productivité des essais cliniques et que la vente de médicaments canadiens ne fait que croître.
Solutions:
Une fois qu’il aura accru son soutien financier aux capacités de traitement informatique nationales, l’État devrait se livrer prioritairement à un examen interdisciplinaire complet des programmes et politiques en vigueur, afin de consacrer une part plus importante des nouveaux fonds aux activités de commercialisation.
L’étoffement de l’infrastructure permettrait d’ailleurs de s’assurer, au-delà des considérations purement financières, que les changements apportés sont pertinents. D’autres formes de soutien (formation à l’entrepreneuriat, perfectionnement des aptitudes…) peuvent aider considérablement les chercheurs à mener l’exploitation commerciale de leurs découvertes.
Pour une meilleure coordination des aides à la commercialisation
Défi à relever
Le financement accru des efforts de commercialisation est une chose. Il est possible aussi d’agir plus judicieusement sur d’autres plans. La simplification des politiques gouvernementales et une meilleure coordination des enveloppes financières et des mesures incitatives pousseraient les entreprises à conserver au Canada le fruit des recherches qui y sont menées ainsi que le personnel auquel on les doit.
En raison de la diversité des programmes d’aide, il est parfois compliqué d’obtenir telle ou telle forme de financement prévue pour les sciences de la vie, et cela ne contribue pas de manière optimale à la commercialisation des découvertes. Rappelons que près de 80 % des programmes portent sur les travaux de recherche-développement ; à peine 15 % des programmes prennent en compte les possibles activités de mise en marché. Moins de 10 % du financement est dévolu expressément à la commercialisation.
Par ailleurs, l’État canadien penche pour la large répartition d’une richesse pourtant limitée. Les chercheurs du Canada passent donc parfois leur temps à solliciter de petites subventions, programme après programme, contrairement à leurs homologues étrangers. Aux États-Unis par exemple, où les National Institutes of Health (NIH) et la Small Business Association (SBA) administrent des programmes beaucoup plus généreux, une seule demande de subvention peut suffire.
Solutions:
Les analystes estiment que le Canada a besoin d’un organisme fédéral qui fera la promotion du secteur des sciences de la vie, favorisera la collaboration et vérifiera si les objectifs des politiques sont atteints. On obtiendrait ainsi un niveau de cohésion et de leadership sectoriels qui n’existe pas aujourd’hui. Une telle agence pourrait aussi se faire la porte-parole des scientifiques désireux de conseiller le gouvernement en la matière.
À tout le moins, l’organisme aiderait les chercheurs à se mettre en contact avec les intervenants qu’exige la mise en marché (spécialistes en IA ou en robotique, sociétés de capital-risque et experts en gestion ou en exploitation). L’agence pourrait aussi faciliter les communications avec les chercheurs étrangers qui ont su franchir le cap décisif de la commercialisation.
Comment tirer le meilleur parti d’une main-d’œuvre hautement qualifiée
Défi à relever
En sciences de la vie comme ailleurs, le succès repose avant tout sur ceux et celles qui expérimentent, innovent et bâtissent. Pour que le secteur ait les moyens de réaliser son potentiel de croissance, le Canada doit en faire davantage pour attirer, former et conserver les meilleurs éléments.
Les conditions d’exploitation doivent aussi être concurrentielles. Parce que d’autres pays surclassent le Canada sur la question des plans d’infrastructure et d’investissement visant à promouvoir l’innovation, le risque de fuite des cerveaux et de perte de propriété intellectuelle est bien réel. Il sera difficile de retenir les chercheurs qu’on s’arrache si le Canada ne veille pas à leur assurer un accès permanent à des moyens haut de gamme et à les soutenir financièrement.
Solutions:
En plus de cultiver un écosystème d’innovateurs dynamique et d’investir dans l’infrastructure dont il a besoin, le Canada doit bonifier les investissements directs axés sur les ressources humaines et les établissements de formation. Le fait de financer davantage l’acquisition de tel ou tel savoir-faire – non seulement en science pure, mais aussi sur le plan technologique ou commercial – ne peut que profiter au secteur des sciences de la vie.
Le temps nous est compté
Les intervenants publics et privés peuvent bien décider d’injecter rapidement plus d’argent, quand les chercheurs s’en vont à l’étranger, ils ne reviennent généralement pas de sitôt. Or c’est d’eux que dépend la vitalité du secteur. Aussi faut-il agir sans tarder et, idéalement, en assurant une meilleure coordination entre les instances gouvernementales, les entreprises, les universités et les chercheurs, toutes disciplines confondues.
Le problème de croissance économique qu’éprouve le Canada a fait que sa productivité s’est érodée pendant des décennies. Nous devons adopter une nouvelle mentalité, récompenser davantage l’innovation et investir massivement dans deux domaines clés : l’élément humain et la technologie.
Cette nouvelle attitude serait tout à fait appropriée dans le secteur des sciences de la vie, où le Canada fait bonne figure. En stimulant dès maintenant cette branche d’activité, on lui permettrait d’agir davantage comme levier de croissance économique, avec toutes les retombées que cela impliquerait pour les autres secteurs… et pour la santé future des Canadiens.
Contributors:
Ajay Nandalall, associé, Recherche
Steven Frank, Rédacteur en chef collaborateur
Caprice Biasoni, Graphiste spécialisée
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